Augmentation de la dépendance à la nicotine à l’âge adulte chez les sujets exposés à l’adolescence 

Plusieurs études épidémiologiques suggèrent que la dépendance à la nicotine est accrue lorsque les sujets ont commencé à fumer tôt, dans l’adolescence. Aujourd’hui, l’équipe de chercheurs menée par Pier Vincenzo Piazza (directeur de l’Unité Inserm 588 « Physiopathologie du Comportement » à Bordeaux) montre que l’adolescence est une période qui se caractérise par une forte vulnérabilité neurobiologique à la nicotine. Cette étude, réalisée sur un modèle de rat, met en évidence que les modifications neuronales et comportementales qui se mettent en place dans la période de l’adolescence en réponse à la nicotine facilitent la dépendance à l’âge adulte.

Les chercheurs ont comparé, sur des rats, les effets d’une exposition à la nicotine à des âges différents, notamment durant la période de péri-adolescence (entre 7 à 10 jours avant la puberté jusqu’aux quelques jours qui suivent) et la post-adolescence. Une fois ces animaux adultes, ils ont étudié l’auto-administration de nicotine et l’expression d’un des substrats neurobiologiques de la dépendance à cette drogue : le récepteur à l’acétylcholine. Pour mesurer le comportement d’auto-administration de nicotine, les rats sont placés dans une cage équipée d’un trou dans lequel il leur suffit d’appliquer le museau pour obtenir l’administration d’une dose de nicotine. Les animaux peuvent ainsi apprendre à s’auto-administrer de façon spontanée la drogue. Leur activité locomotrice est également enregistrée. D’autres animaux sont testés comme contrôle et ne reçoivent qu’une solution saline au lieu de la nicotine. L’étude montre que le traitement à la nicotine pendant la péri-adolescence fait augmenter la motivation à s’auto-administrer la nicotine chez les sujets adultes. Ces animaux prennent des quantités plus importantes de drogue, et sont disposés à fournir un travail plus important pour obtenir la nicotine que les animaux traités seulement à la post-adolescence. De plus, les observations montrent que l’expression des gènes des récepteurs neuronaux à l’acétylcholine augmente sélectivement chez les sujets exposés à la nicotine à la péri-adolescence. C’est probablement au travers de cette modification que ces animaux deviennent plus sensibles à la nicotine. Chez ce modèle animal, pertinent pour l’extrapolation à l’homme, ces résultats montrent que l’adolescence est une période critique du développement, caractérisée par une vulnérabilité comportementale et neurologique plus grande à la nicotine.

Pour en savoir plus

Evidence for enhanced neurobehavioral vulnerability to nicotine during periadolescence in rats W. Adriani1, S. Spijker2, V. Deroche-Gamonet1, G. Laviola, M. Le Moal1, A. B. Smit2 and P. V. Piazza1 1 Unité Inserm 588, Bordeaux 2 Department of molecular and cellular neurobiology, Institute of Neurosciences, Amsterdam, The Netherlands 3 Section of behavioral Pathophysiology, Istituto Superiore di Sanita, Rome, Italy Journal of Neuroscience 23(11), June 1, 2003

Ø Contact chercheur Pier Vincenzo Piazza Unité Inserm 588 « Physiopathologie du Comportement » Université de Bordeaux II, Bordeaux Pier-Vincenzo.Piazza@bordeaux.inserm.fr