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Zoom sur la e-cigarette, les points-clés
Inventée en 2003 par un pharmacien chinois, son usage s’est répandu en quelques années dans le monde entier. Selon l’Eurobaromètre 2012, 25 millions d’Européens l’auraient testée, dont 3 millions de Français. Son appropriation par le public a pris de court les fabricants de cigarettes et les laboratoires pharmaceutiques. En effet, même si elle représente moins de 1 % du marché du tabac, les fabricants de cigarettes commencent à en comprendre la nuisance en termes de concurrence économique, certains fumeurs la substituant à la cigarette conventionnelle.
Va-t-on vers la fin de celle-ci, et la cigarette électronique va-t-elle prendre la place des substituts nicotiniques dans le sevrage tabagique ? L’absence actuelle de statut et les incertitudes sur la fabrication du produit constituent un frein à sa recommandation. Pourtant en France, 500 000 personnes l’utilisent régulièrement. Mandaté par la ministre de la Santé Marisol Touraine, le professeur B.Dautzenberg a rendu le 28 mai 2013 un rapport d’experts. Réalisé par dix spécialistes du tabagisme et cinquante relecteurs, il fait un point exhaustif sur ce nouveau produit, car « …exiger les résultats d’études attendues dans une à cinq années pour prendre des décisions reviendrait à laisser les utilisateurs… sans protection et à la merci du marché ».
Cet « ersatz » de cigarette se compose de trois parties : une batterie, un vaporisateur et une cartouche. La batterie chauffe une résistance qui provoque la vaporisation d’un liquide contenu dans la cartouche. Le consommateur « vapote » : il simule le geste de fumer, inhale et exhale un nuage de vapeur et peut retrouver le goût du tabac en fonction de la composition du liquide choisi.
La batterie est rechargeable par chargeur ou prise USB, son autonomie dépend de sa capacité en milliampères-heure. Plus elle est importante, plus le poids et la taille de l’e-cigarette augmentent. La tension électrique est de l’ordre de 4 volts. Une batterie de forte tension chauffera davantage la résistance et produira plus de vapeur. Le « vapoteur » choisit sa batterie en fonction de sa consommation journalière.
Le vaporisateur ou atomiseur contient une résistance chauffante, un microprocesseur qui régule la chaleur, une mèche ou tresse qui s’imprègne de liquide par capillarité. L’utilisateur déclenche le chauffage de la résistance soit manuellement, en appuyant sur un interrupteur, soit plus souvent automatiquement grâce à un capteur sensible à l’aspiration.
La cartouche, en matériau plastique ou en métal, est un réservoir de contenance variable selon l’autonomie, rempli du liquide qui imprègne une bourre synthétique ou métallique. La bourre empêche un écoulement trop important vers l’atomiseur. Le liquide est aromatisé et contient ou non de la nicotine. La cartouche est réutilisable, pouvant être remplie à nouveau. Quand elle est indissociable de l’atomiseur, on parle de cartomiseur. Un cartomiseur sans bourre est appelé clearomiseur.
Un embout est adapté à l’extrémité libre de la cartouche. Quand le vapoteur aspire, la pression négative active le microprocesseur, la résistance chauffe le liquide de la cartouche avec l’air inspiré. L’e-liquide s’évapore à environ 60°C, le produit vaporisé est diffusé dans les bronches jusqu’aux alvéoles, où 20 % des gouttelettes se déposent et participent aux échanges gazeux. Le reste sera exhalé.
À l’autre extrémité de l’e-cigarette, une diode lumineuse simule la combustion, mais ce gadget est de moins en moins utilisé, car les nouveaux modèles doués d’une autonomie importante grâce à leur cartouche et leur batterie ressemblent de moins en moins à une cigarette. Les e-cigarettes jetables entièrement scellées cèdent la place aux dispositifs réutilisables. Le vissage des différents éléments est sécurisé.
On ne pompe pas l’air à travers le système : l’aspiration doit être douce, et sa durée ne doit pas dépasser 3 à 4 secondes. Une aspiration plus prolongée entraîne une surchauffe de la résistance et peut l’endommager. La dépression nécessaire pour enclencher le chauffage de la résistance et la production de vapeur est en moyenne de 3 à 5 cm d’eau, mais peut varier selon les modèles. La densité de vapeur diminue au bout d’une dizaine de bouffées et il faut exercer une dépression plus importante pour obtenir plus de vapeur, avec le risque d’une pénétration plus importante de celle-ci dans les voies aériennes (A. Trichounian, Tob Res, sept. 2010).
Les fabricants estiment que 300 bouffées tirées correspondent à un paquet et demi de cigarettes classiques et qu’un flacon d’e-liquide de 10 ml remplace 200 cigarettes.
Sur le même principe de fonctionnement se vendent des pipes, des cigares et des chichas électroniques.
Nous vous invitons à lire notre Chronique n° 18 au sujet de la cigarette électronique.
- Chronique 18 : la cigarette électronique
- Les dessous de la cigarette électronique ? Y a-til danger ?
Fumer la cigarette électronique, est-ce dangereux ?
Fumer une cigarette électronique ne doit pas être un acte anodin. Certes, en absence de combustion, la cigarette électronique ne produit pas de monoxyde de carbone, de goudrons, d’hydrocarbures ni de nitrosamines, substances responsables des maladies cardiovasculaires et des cancers. Cepependant, les vapeurs émises par la cigarette électronique contiennent des substances cancérogènes ou potentiellement cancérogènes, même si les études actuelles montrent qu’elles s’y trouvent en quantités très inférieures à celles des cigarettes conventionnelles.
Ainsi par exemple, la Ligue nationale contre le cancer rappelle que le but en termes de santé publique, est l’arrêt total de la consommation de tabac. Dans l’attente d’études scientifiques complémentaires se prononçant sur l’efficacité et l’innocuité de la cigarette électronique en tant qu’aide au sevrage tabagique, elle recommande de :
- Déconseiller fortement l’usage de la cigarette électronique aux mineurs, aux femmes enceintes et aux non-fumeurs car elle contient des substances addictives et toxiques.
- Réserver l’usage de la cigarette électronique aux fumeurs souhaitant arrêter de fumer et ayant échoué avec les moyens conventionnels d’aide à l’arrêt.
- Avertir les personnes sur la méconnaissance des bénéfices et des risques liés à son utilisation au-delà de six mois. "
Nous ne disposons pas encore d’études sur du long terme pour assurer que la cigarette électronique est sans danger. Il est donc nécessaire d’être très prudent avec ce produit et d’en limiter l’usage dans le temps.
Un récent article de 60 millions de consommateurs a mis en lumière la nocivité des cigarettes électroniques. 60 millions de consommateurs, septembre 2013, n° 485 « Pas si inoffensive, la cigarette électronique ! »
- La nicotine contenue dans les flacons d’e-liquide peut provoquer des intoxications graves en cas d’exposition cutanée, particulièrement chez l’enfant. Ingérée, elle peut même être mortelle, si la concentration est élevée, ce qui est le cas pour certaines références de leur étude.
- Parmi les molécules détectées dans les vapeurs de certaines e-cigarettes, trois sont particulièrement préoccupantes :
Le formaldéhyde (couramment dénommé formol), polluant de l’air intérieur classé dans la liste des produits cancérogènes pour l’homme par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). En outre, dans 3 cas sur 10, et ce pour des produits avec ou sans nicotine, les teneurs relevées flirtent avec celles observées dans des cigarettes conventionnelles.
L’acroléine, molécule très toxique par inhalation et ingestion, probablement formée à partir de la glycérine du liquide de base (nicotiné ou non) durant son réchauffement, a été relevée, pour certaines cigarettes électroniques, à des teneurs dépassant même parfois celles mesurées dans la fumée de cigarettes conventionnelles.
L’acétaldéhyde, classé cancérogène possible par le CIRC, émis à des teneurs parfois loin d’être négligeables, mais très inférieures à celles observées avec des cigarettes conventionnelles. Dans les vapeurs de certaines cigarettes électroniques, la présence de métaux potentiellement toxiques a été détectée, parfois même à des niveaux équivalents ou supérieurs à ceux d’une cigarette conventionnelle : nickel, chrome, cadmium, plomb, aluminium, antimoine. - De nombreux emballages de cigarettes électroniques « oublient » de mentionner la présence, pourtant majeure, de propylène glycol dans le liquide de base.
- Enfin, outre ces risques intrinsèques liés à l’inhalation des vapeurs des cigarettes électroniques, l’impact à long terme de l’exposition à ce produit est encore méconnu.
Par la suite, l’article aborde l’avenir de la cigarette électronique. « Cigarette électronique. Un horizon encore vaporeux »
- De nombreuses autorités de santé sont très réservées sur la cigarette électronique à cause des incertitudes sur les effets à long terme sur la santé et, également, du fait de la présence dans certains e-liquides de nicotine dont la puissance addictive est connue. Elles conseillent la plus grande prudence ou, parfois même, l’abstention. C’est le cas des Food and Drug Administration (FDA) aux Etats-Unis, Ministère de la Santé canadien, Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) en France, Medicines and Healthcare products Regulatory Agency (MHRA) en Grande-Bretagne, Organisation mondiale de la Santé (OMS)…
- De ce fait, la cigarette électronique est même interdite dans plusieurs pays : Brésil, Grèce, Lituanie, Canada, Singapour, Australie.
- Plusieurs pays ont, quant à eux, interdit son usage dans les lieux publics : Belgique, Malte, Suisse.
Toutefois, l’UFC dresse un portrait très positif de la cigarette électronique, comme outil pour sortir du tabac, et s’inquiète des projets européens de soumission de ce produit à la réglementation relative aux médicaments.
- L’UFC affirme, malgré le peu d’études sur l’exposition répétée au propylène glycol et au glycérine végétal (90 à 95% des liquides de base), que les quelques éléments existants seraient très rassurants.
- L’UFC relève que la FDA américaine aurait trouvé des nitrosamines (impuretés issues de l’extraction de la nicotine, cancérogènes) dans la moitié des liquides analysés, mais qu’il ne s’agirait que de traces.
- L’UFC rappelle que des mesures en laboratoire ont montré que la bouffée, produite par la cigarette électronique, contenait essentiellement du propylène glycol et de la glycérine, mais, également, des polluants, dont le formaldéhyde (cancérogène pour l’homme). Toutefois, l’UFC affirme que les valeurs retrouvées étaient minimes.
- L’UFC ne nie pas la possibilité de « vapotage » passif, puisque des analyses auraient retrouvé de la cotinine dans le sang et les urines de personnes exposées à la cigarette électronique, mais elle relève que la quantité était moindre qu’en cas d’exposition au tabac
- L’UFC a trouvé, au cours de ses tests, des taux de nicotine quasiment systématiquement différents de ceux indiqués sur l’emballage (le plus souvent à la baisse, une fois au-dessus de la limite réglementaire).
- L’UFC rappelle que la nicotine des liquides est dangereuse, en cas d’ingestion, pouvant même conduite à la mort. Elle irrite, en outre, la peau.
- L’UFC a trouvé, également, du propylène glycol, ainsi que de l’alcool, dans des produits qui n’en faisaient pas mention sur leurs étiquettes.
- Enfin, l’UFC a constaté des fuites de liquide sur certaines cigarettes électroniques.
Peut-on fumer la cigarette dans les lieux fermés et couverts à usage collectif ?
La propagande des fabricants de cigarettes électroniques prétend que se servir d’une cigarette électronique n’est pas fumer, mais « vapoter » au prétexte que le verbe fumer ne pourrait être utilisé que pour un produit qui se consume.
Le dictionnaire de l’académie française est pourtant très clair dans la définition du mot fumée : « Mélange de gaz, de vapeur d’eau et de particules plus ou moins fines, qui se dégage d’un corps en combustion ou porté à très haute température » . Cette définition correspond parfaitement à la situation pour laquelle, sauf intention douteuse, il était inutile d’inventer un mot nouveau. En inhalant, puis en rejetant de la fumée à l’aide d’un objet revendiqué comme « cigarette », il nous parait logique d’affirmer que l’on fume car, à ce jour, aucun autre verbe reconnu ne peut qualifier cette action.
En attendant qu’une jurisprudence définisse plus clairement la position de la cigarette électronique, DNF considère donc qu’elle entre dans le champ d’application de l’article R3511-1 du Code de santé publique qui stipule qu’il est interdit de fumer dans les lieux fermés et couvert qui accueillent du public ainsi que dans tous les espaces non couverts des écoles, collèges et lycées publics et privés, comme dans tous les établissements destinés à l’accueil, à la formation ou à l’hébergement des mineurs.
La position de DNF est d’ailleurs rejointe par les experts en droit du travail qui recommandent aux entreprises d’interdire ce type de produit dans leur règlement intérieur. Conseils que les entreprises mettent aujourd’hui en application.
La publicité est-elle autorisée pour la cigarette électronique ?
Une jurisprudence constante proscrit toute forme de publicité ou de propagande en faveur du tabac et des produits du tabac ; elle précise qu’est interdite la promotion de tout ce qui rappelle, de près ou de loin, le tabac ou les produits du tabac dans la mesure où la publicité en est faite sous un jour favorable.
2.1. L’interdiction de la publicité ou de la propagande a un large champ d’application dans les textes existants.
« La propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur du tabac, des produits du tabac ou des ingrédients définis au deuxième alinéa de l’article L.3511-1 ainsi que toute distribution gratuite ou vente d’un produit du tabac à un prix inférieur à celui mentionné à l’article 572 du code général des impôts sont interdites. » (article L.3511-3 du Code de la santé publique - CSP)
En outre, « toute opération de parrainage est interdite lorsqu’elle a pour objet ou pour effet la propagande ou la publicité directe ou indirecte en faveur du tabac, des produits du tabac ou des ingrédients définis au deuxième alinéa de l’article L.3511-1 » (article L.3511-3 du CSP)
Le caractère indirect est établi dès lors que la propagande ou la publicité pour autre chose que le tabac, les produits du tabac ou ses ingrédients (au sens du deuxième alinéa de l’article L.3511-1), « par son graphisme, sa présentation, l’utilisation d’une marque, d’un emblème publicitaire ou un autre signe distinctif, […] rappelle le tabac, un produit du tabac ou un ingrédient défini au deuxième alinéa de l’article L.3511-1. » (article L.3511-4 du CSP)
Les exceptions à l’interdiction sont posées par l’article L.3511-3 du CSP :
- Enseignes des débits de tabac, affichettes disposées à l’intérieur de ceux-ci si non visibles de l’extérieur ;
- Publications et services de communication en ligne édités par les organisations professionnelles de producteurs, fabricants et distributeurs des produits du tabac, réservés à leurs adhérents ou aux professionnels du secteur ; publications professionnelles spécialisées dont la liste est établie par un arrêté ministériel signé par les ministres chargés de la santé et de la communication ;
- Publications et services de communication en ligne mis à disposition du public par des personnes établies hors de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen, dès lors que ces publications et services ne sont pas principalement destinés au marché communautaire.
2.2. Les infractions à l’interdiction de la publicité ou de la propagande sont sévèrement réprimées dans les textes existants.
Les infractions aux dispositions de l’article L.3511-3 du CSP « sont punies de 100 000 euros d’amende. En cas de propagande ou de publicité interdite, le maximum de l’amende peut être porté à 50% du montant des dépenses consacrées à l’opération illégale ». (article L.3512-2 du CSP) En outre, « le tribunal ordonne, s’il y a lieu, la suppression, l’enlèvement ou la confiscation de la publicité interdite aux frais des délinquants. » (article L.3512-2 du CSP) Enfin, « les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables, dans les conditions prévues à l’article 121-2 du Code pénal » de ces infractions. (article L.3512-3 du CSP)