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Panorama de presse : Interdiction de fumer dans les lieux publics
TABAC
Interdiction de fumer dans les lieux publics
A l’approche du 1er février, L’AFP qui consacre une série de dépêches à cette interdiction, fait un point sur les lieux où il sera interdit de fumer, et sur les agents habilités à verbaliser, mais aussi sur l’angoisse des fumeurs et la manière dont ils vont pouvoir faire face à l’interdiction. Des dépêches également sur le rôle du tabacologue, le coût de l’interdiction à court terme et les économies réalisées à long terme ainsi que sur la progression de cette interdiction en Europe.
L’AFP qui souligne que dès le 1er février on ne fume plus ni au travail ni à l’école, observe qu’ainsi entre 13 et 15 millions de fumeurs seront « hors la loi » dans les entreprises, les administrations et les établissements scolaires. Indiquant que le tabac est la première cause de mortalité évitable en France et la première cause de cancers, l’agence observe que les non fumeurs représentent plus de 70% de la population, 80% d’entre eux se déclarant gênés par la fumée. D’après l’agence, les établissements scolaires seront soumis à un régime « particulièrement sévère », tant pour les élèves que pour les enseignants, puisqu’il sera interdit de fumer même dans une cour de récréation non couverte et qu’il sera interdit d’y installer des « fumoirs ». L’agence qui souligne que pour leur part les entreprises auront le choix d’aménager des « fumoirs », le projet devant être soumis au Comité d’hygiène, de santé et des conditions de travail ou aux délégués du personnel et au médecin du travail, précise qu’en revanche selon le ministre de la fonction publique l’Etat doit être « irréprochable » et ne doit pas accepter de « tolérances » dans les administrations. En conclusion l’agence relève que pour ne pas « stigmatiser » les fumeurs, le gouvernement a souhaité accompagner l’interdiction d’une campagne d’information et de mesures d’aide à l’arrêt du tabac avec un remboursement à hauteur de 50 euros par an des dépenses liées à l’achat de substituts nicotiniques. « Qui va verbaliser ? » interroge ensuite l’AFP qui reprend pour répondre les termes de la circulaire du 20 novembre, selon laquelle « les officiers et agents de police judiciaire ont compétence » pour constater les infractions de même que « les médecins inspecteurs de santé publique (MISP), les ingénieurs du génie sanitaire (IGS), les inspecteurs de l’action sanitaire et sociale (IASS) dès lors qu’ils auront été habilités et assermentés » ainsi que les inspecteurs et contrôleurs du travail. Notant que dans les moyens de transport collectifs et les gares « les agents de l’exploitant dûment assermentés » peuvent également constater les infractions, l’agence relève qu’au ministère de la défense ce sont « les agents du contrôle général des armées chargés de l’inspection du travail » qui sont déclarés compétents pour « constater la non application de la réglementation et saisir les services de la gendarmerie, seuls habilités à constater les infractions et dresser procès verbal ». L’agence relève que d’ores et déjà, les syndicats représentant les corps du ministère de la santé ont protesté contre ces mesures refusant de « mettre des PV aux fumeurs ». Le responsable du SMISP (syndicat des médecins inspecteurs) a déclaré « Nous les médecins, nous ne verbalisons pas les malades, nous les soignons ».
L’AFP qui se penche sur la situation du fumeur qui devra passer une journée au bureau sans fumer, observe que les « accros » abordent l’échéance du 1er février avec l’angoisse de devoir « tenir » plusieurs heures sans tabac, pour souligner qu’il auront un ultime recours : les substituts nicotiniques oraux. L’agence qui rapporte que selon le Pr Dautzenberg, ces substituts peuvent aider ponctuellement le fumeur très dépendant sans inconvénient pour sa santé ni celle des autres, relève qu’à partir du 1er février les seuls « refuges » pour les fumeurs au travail seront le trottoir ou le fumoir, sachant que tous les salariés ne pourront pas disposer de fumoirs, de nombreuses entreprises ayant choisi l’option « locaux totalement non fumeurs ». Evoquant le « scénario catastrophe » qui se profile pour les « accros » insensibles aux incitations au sevrage, l’agence précise qu’ils auront à tenir plusieurs heures « avec l’angoisse du stress, de l’énervement, la peur d’être en manque... et de devenir insupportable pour (leurs) collègues ». Le Pr Dautzenberg leur donne deux conseils « accepter l’interdiction » et « avoir dans sa poche des substituts nicotiniques oraux ». Ajoutant que « le fait de savoir que ça existe apaise beaucoup les choses », il rappelle que lors de la mise en place de l’interdiction de fumer sur les vols longs courriers d’Air France, des substituts nicotiniques ont été prévus dans la boîte à pharmacie des avions pour répondre au stress des fumeurs. Selon lui, les premières semaines seront les plus difficiles, et il assure « Quand on passe à des locaux non fumeurs, il y a une grande angoisse et un besoin de fumer qui dure un mois et demi à deux mois. Après dans une pièce qui est non fumeur, les gens n’ont pas envie de fumer ». Le psychiatre Pierre Angel affirme « l’idée ( ...) c’est de prendre la chose du bon côté car la plupart des fumeurs souhaitent arrêter » mais pour lui, les substituts ne sont pas « la panacée » car ils ne peuvent pas supprimer « complètement la souffrance », sachant qu’il faut prendre en compte « la dimension d’anxiété et de dépression » que peuvent éprouver certains fumeurs. Pour les cas « résistants » le médecin propose une aide « par des techniques psychologiques et aussi parfois par des médicaments ». L’agence qui explique que l’abstinence temporaire fait aussi partie des indications des substituts oraux, rapporte que selon le laboratoire GSK, 10% des utilisateurs de sa gamme sont des « abstinents temporaires ».
Un point sur le tabacologue, « professionnel de santé formé pour aider les fumeurs ». L’agence qui indique que ce professionnel est le plus souvent médecin mais qu’il peut aussi être infirmier, sage femme ou pharmacien, précise que c’est une compétence récente avec cinq diplômes interuniversitaires de tabacologie répertoriés actuellement en France. Soulignant que le gouvernement entend doubler les 500 consultations existantes, l’agence rapporte que pour le Pr Dautzenberg, le tabacologue est « une réponse importante pour les patients les plus en difficulté » car selon lui « c’est toujours possible d’arrêter seul mais on a deux à trois fois moins de chance de réussir (...) et plus de chance de prendre du poids ». D’après l’agence, cinq ou six consultations en moyenne sont nécessaires pour un arrêt total et en moyenne les fumeurs qui réussissent à s’arrêter ont fait trois ou quatre tentatives. Expliquant que le tabacologue dispose de « deux outils essentiels » : des questionnaires permettant d’évaluer la dépendance tabagique et une analyseur de monoxyde de carbone qui fait prendre conscience au fumeur du niveau de pollution de ses poumons, l’agence souligne que selon le Pr Dautzenberg, il y a trop de fumeurs qui veulent arrêter pour imaginer que les tabacologues puissent tous les prendre en charge et il est donc nécessaire que d’autres soignants prennent le relais.
L’AFP estime que cette interdiction aura un coût à court terme mais permettra de réaliser des économies à plus long terme. L’agence qui indique qu’à court terme cette interdiction entraînera des coûts pour l’industrie du tabac et les buralistes, relève que les industriels s’attendent à une baisse des ventes de cigarettes de 2% pour 2007, baisse qui pourrait atteindre 5% après l’interdiction de 2008, alors que pour leur part les buralistes estiment à 25% ou 30% la baisse de leur chiffre d’affaire dont la moitié provient de la vente du tabac. Notant que « tout aussi alarmistes », les restaurateurs, craignent une baisse de fréquentation de 20 à 30%, l’agence observe que certains professionnels du secteurs, tempèrent toutefois cet alarmisme comme le groupe Flo qui a proscrit la cigarette dans certains de ses restaurants et dit n’avoir enregistré « ni perte de chiffre d’affaire, ni baisse de fréquentation ». Considérant que les économies à attendre en matière de santé sont plus difficilement quantifiables, l’agence rapporte que selon l’économiste Pierre Kopp « il y aura un impact à la baisse mais seulement à long terme ». D’après l’agence, ces économies pourraient être conséquentes quand on sait que les dépenses de santé entraînées par le tabac s’élèveraient à 18,2 milliards d’euros an, soit 1355 euros par fumeur. L’agence précise que les maladies cardiovasculaire, dont 50% sont imputables au tabac, ont un coût de 9,2 milliards d’euros, que les maladies respiratoires du fumeur représentent près de 5 milliards, alors que les cancers liés au tabac entraînent des dépenses plus faibles (1,3 milliard), sachant que « les malades atteints (...) du cancer du poumon décèdent rapidement ». Et de pointer en conclusion qu’il ne faudra toutefois pas oublier de déduire de ces économies, les nouvelles dépenses liées aux retraites qui seront versées plus longtemps, à plus de gens, si le tabac fait moins de victimes.
D’après l’AFP, l’interdiction de fumer dans les lieux publics se généralise en Europe depuis deux ans, à l’exception notoire des bars et restaurants pour lesquels de nombreux pays ont prévu des aménagements. Rappelant que l’Irlande a été la première à interdire totalement le tabac dans les lieux publics, suivie par la Norvège (hors UE), l’Italie, Malte, la Suède, l’Ecosse, la Lettonie, la Lituanie, et bientôt Le Pays de Galles et l’Angleterre, l’agence souligne que l’Allemagne en revanche est à la traîne puisque le Parlement vient seulement d’y voter l’interdiction de la publicité sur le tabac alors que le Portugal n’a pas encore de loi mais en prépare une interdisant le tabac dans les lieux publics (y compris bars et restaurants) D’après l’agence, à l’exception de la Grèce et de la Hongrie, où les interdictions sont globalement ignorées, les mesures introduites au nom de la lutte contre le tabagisme passif ont été assez bien acceptées par les fumeurs qui sont en très grande majorité favorables à la loi. L’agence qui relève que toutefois sous la pression des restaurateurs, de nombreux pays ont prévu des exceptions pour bars et restaurants, observe qu’en Autriche et en République Tchèque ils ne font l’objet d’aucune interdiction, qu’en Espagne l’immense majorité des établissements qui en avaient la possibilité ont choisi de rester fumeurs, qu’au Luxembourg la loi épargne les boîtes de nuit et permet aux restaurants de réserver un espace fumeur dans une pièce séparée, qu’en Belgique le tabac est proscrit dans les restaurants mais autorisé dans les bars, alors qu’en Finlande, où l’interdiction s’appliquera en juillet, les restaurateurs pourront créer des fumoirs. Conclusion sur un sondage européen qui montre si 63% des Européens sont favorables à une interdiction de fumer dans les lieux publics et au travail ils ne sont que 40% à soutenir cette interdiction dans les bars et cafés.
Dans VALEURS ACTUELLES un débat entre Xavier Bertrand, ministre de la santé, et l’écrivain François Taillandier, sur la légitimité d’une interdiction de fumer dans les lieux publics. Xavier Bertrand qui soutient la mesure, évoque les 66 000 morts du tabagisme et les 5000 morts du tabagisme passif, précisant « nous avons agi avec pragmatisme pour que cette décision soit non seulement acceptable mais acceptée ». Pour lui, l’objectif est de « protéger la vie du plus grand nombre », sachant que le tabagisme passif augmente de 70% le risque d’infection pulmonaire chez les enfants, de 25% le risque de cancer du poumon, et de 50% celui d’avoir une crise cardiaque. Il souligne que les salariés exposés au tabagisme passif ont une espérance de vie diminuée et que d’ailleurs la jurisprudence condamne désormais l’employeur qui ne respecte pas le droit du salarié à ne pas être exposé au tabagisme. Signalant qu’en Italie « les hospitalisations pour infarctus du myocarde ont diminué de 11% » depuis la nouvelle loi, le ministre affirme qu’en France la loi a été prise dans « un esprit de prévention » car « ce n’est pas en stigmatisant les fumeurs mais c’est bien en informant, en les responsabilisant et les en accompagnant » par une prise en charge « à la fois thérapeutique et humaine » que l’on fait reculer le tabagisme. Evoquant les accusation concernant l’hypocrisie de l’Etat en matière de tabac, Xavier Bertrand , affirme que « c’est oublier que le coût sanitaire du tabac est bien supérieur aux recettes qu’il engendre », et à ceux qui qualifient la mesure de « liberticide », il répond que cette mesure qui « ne s’étend pas bien sûr aux lieux privés (...) permettra de mettre fin à la cohabitation forcée entre fumeurs et non fumeurs et ainsi de mieux respecter la liberté de chacun ». Le ministre tient par ailleurs à rappeler « à ceux qui se réclament du libéralisme anglo-saxon pour critiquer cette mesure, que les Etats-Unis où le Royaume Uni sont en avance sur nous », pour ajouter que « s’il est un dernier argument, c’est que la mesure a déjà été prise ou est envisagée dans la plupart des pays européens ». Il fait état pour conclure de la forte adhésion de « nos concitoyens fumeurs » à la mesure puisque plus de 70% d’entre eux y sont favorables, selon les études.
François Taillandier, qui est opposé à cette interdiction, parle « d’évolution politique véritablement glaçante où l’on voit l’UE (.....) sombrer dans une névrose obsessionnelle ». Affirmant qu’il est impossible de traiter ici « tous les aspects d’une question de civilisation hautement sensible », il souhaite se limiter au seul exemple de ce reportage télévisé dans un café où le patron avait anticipé la prohibition et où une jeune femme, accompagnée de son bébé, se réjouissait « de pouvoir désormais fréquenter le café sans l’exposer à des nuisances ». Selon lui, on aurait pu rappeler à cette jeune maman « qu’un bistro en tout état de cause n’est pas un endroit pour les petits enfants » car « le bistrot dans notre civilisation c’est l’endroit où l’on va pour boire (parfois un peu trop) pour jouer (parfois de l’argent) (...) bref pour faire tout ce qui n’est pas très bien vu en famille. Et par conséquent aussi pour fumer. Et puis c’est tout simplement l’endroit où l’on se défoule un peu ». Et il interroge « ceux qui veulent tuer le bistrot (...) ont -ils encore une petite idée de ce qu’est la vie populaire dans nos villages, dans nos banlieues, dans nos quartiers ? ». Evoquant l’argument du « très large acquiescement des populations », l’écrivain objecte que c’est un « argument inquiétant » car « on ne voit pas où et quand la soumission de masse a jamais pu apparaître comme un indicateur du bien ou du mieux dans les sociétés humaines ». François Taillandier qui rappelle qu’il y a, selon Freud, « dans l’être humain une pulsion de mort », considère « qu’en éradiquant les uns après les autres tous les lieux et toutes les pratiques qui permettaient d’intégrer le négatif de l’être humain et sa part d’ombre (...) notre société se condamne à des répressions qui seront de plus en plus implacables contre des violences qui seront de plus en plus imprévues », et il ajoute « préparons nous à une dérive multisécuritaire à côté de laquelle les rêveries de l’extrême droite sembleront aussi folkloriques que la bourrée auvergnate » Et de conclure « Préparons nous enfin (...) à voir apparaître un post citoyen étranger à toute idée de responsabilité personnelle, n’ayant plus aucun sens du respect qu’il doit à la collectivité, à son prochain et à lui-même puisque l’Etat tentaculaire se sera chargé de la morale à sa place ».