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Tabagisme passif : une enseignante atteinte d’un cancer obtient justice
La justice reconnaît que le cancer du poumon d’une enseignante de l’École nationale d’architecture de Toulouse est lié au tabagisme passif. Une première en France.
Depuis des années, l’École nationale supérieure d’architecture de Toulouse décline toute responsabilité dans le cancer du poumon développé par une enseignante en sociologie de l’établissement. Un déni qui ne convainc manifestement pas les juges. Après ceux du tribunal administratif de la Ville rose, ceux de la cour administrative d’appel de Bordeaux viennent à leur tour de donner raison à la plaignante, aujourd’hui à la retraite.
À leurs yeux, la maladie décelée en 2000 ne peut être qu’imputable au non-respect par l’école d’architecture de la loi Évin promulguée il y a vingt et un ans. En généralisant l’interdiction de fumer dans les lieux à usage collectif, elle avait fait figure de grande première. Tout comme l’est d’ailleurs la décision de la cour d’appel. Jamais jusqu’à ce jour, la justice n’avait reconnu un lien de cause à effet entre cancer et tabagisme passif sur un lieu de travail.
La faute de l’école
À l’époque, les responsables de l’École nationale d’architecture avaient cantonné les accros de la cigarette dans un certain nombre d’espaces : hall de l’ancienne entrée, cafétéria, patio principal, couloirs devant les ateliers. Professeurs et élèves avaient continué à griller brunes et blondes où bon leur semblait, notamment dans la salle à manger, sans que la direction réagisse et prenne les mesures pour faire respecter la loi dans l’enceinte de l’établissement.
Plusieurs documents administratifs internes attestent cette incapacité à faire prévaloir le dispositif réglementaire entre 1992 et 1999. La malpropreté des locaux, liée aux mégots jetés en nombre sur le sol, est pointée par une fiche de visite de l’Inspection générale des affaires culturelles. Anecdote significative, dans ces années-là, le tabagisme déclenchait fréquemment l’alarme incendie.
L’École nationale d’architecture a toujours essayé de se défausser en mettant en avant le peu de temps passé par l’enseignante sur le site. Employée de 1968 à 2003, celle-ci ne dispensait en effet que 320 heures de cours par an. Mais, selon les experts qui l’ont examinée, c’était malgré tout suffisant pour déclencher le cancer bronchique primitif qui a débouché sur l’ablation d’un lobe pulmonaire. L’enseignante ne fumait pas. Souffrant d’asthme depuis l’âge de 37 ans, elle évoluait, en dehors de l’école d’architecture, dans un environnement privé où ne se hasardaient guère les disciples de l’herbe à Nicot, du nom de l’ambassadeur de France au Portugal qui rapporta le tabac à Paris en 1560.
Indemnisation ridicule
À Toulouse, les juges avaient chiffré son préjudice à caractère personnel à une somme ridiculement basse : 3 500 euros. Leurs collègues de la cour d’appel se sont montrés un peu plus généreux : 22 320 euros. Le montant reste malgré tout fort modeste. Mais les associations antifumeurs s’en contenteront sans doute et ne retiendront que le sens d’une décision qui légitime leur lutte contre le tabagisme passif. Même si chacun convient que l’exposition à la fumée ne peut être que mauvaise pour la santé, aucune étude scientifique incontestable n’a permis jusqu’à ce jour d’évaluer le nombre précis de décès causés par les fumées de cigarettes.
source : Sudouest.fr