Lignes Directrices sur la protection contre l’exposition à la fumée du tabac
But des directives
1. En conformité avec les autres dispositions de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac et avec les intentions de la Conférence des Parties, les présentes directives visent à aider les Parties à satisfaire à leurs obligations au titre de l’article 8 de la Convention. Elles s’appuient sur les meilleures données factuelles disponibles et sur l’expérience des Parties qui ont réussi à mettre en œuvre des mesures efficaces pour réduire l’exposition à la fumée du tabac.
2. Les directives contiennent des déclarations de principe et des définitions convenues des termes employés, ainsi que des recommandations sur les mesures à prendre pour satisfaire aux obligations découlant de la Convention. Elles recensent en outre les mesures nécessaires pour mettre en place une protection efficace contre les dangers de la fumée secondaire. Les Parties sont encouragées à les utiliser non seulement pour satisfaire à leurs obligations juridiques au titre de la Convention, mais aussi pour adopter les meilleures pratiques en matière de protection de la santé publique.
Objectifs des directives
3. Ces directives ont deux objectifs concomitants. Le premier est d’aider les Parties à répondre à leurs obligations au titre de l’article 8 de la Convention-cadre, en tenant compte des données scientifiques relatives à l’exposition à la fumée de tabac secondaire et des meilleures pratiques mondiales concernant l’application de mesures destinées à promouvoir les environnements sans tabac, de manière à garantir un haut niveau d’observation des dispositions conventionnelles et aider les Parties à atteindre le meilleur état de santé possible. Le second est de recenser les éléments clés d’une législation visant à protéger efficacement la population contre l’exposition à la fumée du tabac conformément à l’article 8.
Considérations sous-jacentes
4. L’élaboration de ces directives a été influencée par les considérations fondamentales suivantes :
a) Le devoir de protéger la population contre la fumée du tabac, consacré par l’article 8 de la Convention, trouve son origine dans les droits et libertés fondamentaux de la personne humaine. Compte tenu des dangers présentés par la fumée de tabac secondaire, le devoir de protéger la population contre l’exposition à la fumée du tabac fait implicitement partie, notamment, du droit à la vie et du droit au meilleur état de santé qu’il est possible d’atteindre reconnus dans de nombreux instruments juridiques internationaux (y compris la Constitution de l’Organisation mondiale de la Santé, la Convention relative aux droits de l’enfant, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels), et il est expressément proclamé dans le préambule de la Convention-cadre de l’OMS et reconnu dans les constitutions de nombreuses nations.
b) Le devoir de protéger les individus contre la fumée du tabac correspond à une obligation, pour les gouvernements, de promulguer des lois protégeant les personnes contre tout ce qui menace leurs droits et libertés fondamentaux. Cette obligation vaut pour l’ensemble de la population et non pas seulement pour certains groupes.
c) Plusieurs organismes scientifiques faisant autorité ont déterminé que la fumée de tabac secondaire est cancérigène. Certaines Parties à la Convention-cadre de l’OMS (par exemple la Finlande et l’Allemagne) ont classé la fumée de tabac secondaire parmi les substances cancérigènes et ont inclus la prévention contre l’exposition à cette fumée sur les lieux de travail dans leur législation en matière de santé et de sécurité. En dehors des prescriptions de l’article 8, les Parties pourraient donc être amenées à régler le problème de l’exposition à la fumée du tabac conformément à leurs lois existantes sur l’environnement professionnel et à d’autres lois régissant l’exposition à des substances dangereuses, y compris les produits cancérigènes.
DÉCLARATION DE PRINCIPES ET DÉFINITIONS RELATIVES A LA PROTECTION CONTRE L’EXPOSITION A LA FUMEE DU TABAC
Principes
5. Ainsi que le souligne l’article 4 de la Convention-cadre de l’OMS, un engagement politique fort est nécessaire pour prendre des mesures visant à protéger tous les individus contre l’exposition à la fumée du tabac. L’application de l’article 8 de la Convention devrait être guidée par les principes convenus suivants.
Principe 1
6. Des mesures efficaces de protection contre l’exposition à la fumée du tabac comme celles qui sont envisagées à l’article 8 de la convention-cadre de l’OMS passent par une interdiction totale de fumer et par une élimination totale de la fumée du tabac dans un espace ou un environnement donnés afin de créer un environnement à 100 % sans tabac. Il n’existe pas de seuil au-dessous duquel l’exposition à la fumée du tabac serait sans danger, et des notions comme celles de seuil de toxicité pour la fumée secondaire devraient être rejetées, car elles sont démenties par les données scientifiques. Toutes les solutions autres qu’un environnement à 100 % sans tabac, y compris la ventilation, la filtration de l’air et la création de zones fumeurs désignées (qu’elles soient ou non équipées de systèmes de ventilation séparés) ont fait à maintes reprises la preuve de leur inefficacité et il existe quantité de données probantes, scientifiques ou autres, qui montrent que les solutions techniques ne protègent pas contre l’exposition à la fumée du tabac.
Principe 2
7. Tout le monde devrait être protégé contre l’exposition à la fumée du tabac. Tous les lieux de travail intérieurs et tous les lieux publics intérieurs devraient être sans tabac.
Principe 3
8. Il est nécessaire de légiférer pour protéger les gens contre l’exposition à la fumée du tabac. En la matière, les politiques reposant sur le volontariat ont montré à maintes reprises leur inefficacité et n’offrent pas une protection adéquate. Pour être efficace, la législation doit être simple et claire et doit pouvoir être appliquée dans la pratique.
Principe 4
9. Une bonne planification et des ressources adéquates sont indispensables pour réussir à mettre en œuvre et à faire appliquer la législation sur les environnements sans tabac.
Principe 5
10. La société civile a un rôle central à jouer en soutenant les mesures de protection contre la fumée du tabac et en contribuant à les faire respecter, et elle devrait être activement associée au processus d’élaboration, de mise en œuvre et d’application de la loi.
Principe 6
11. La mise en œuvre de la législation sur les environnements sans tabac ainsi que son application pratique et son impact devraient faire l’objet d’une surveillance et d’une évaluation. Il faudrait en particulier surveiller – et lutter contre – les activités de l’industrie du tabac qui font obstacle à la mise en œuvre et à l’application de la législation, comme le prévoit l’article 20.4 de la Convention-cadre de l’OMS.
Principe 7
12. La protection de la population contre l’exposition à la fumée du tabac devrait être renforcée et étendue si nécessaire, notamment par une modification de la législation ou l’adoption de nouvelles lois et leur application plus stricte et par d’autres mesures tenant compte des nouvelles données scientifiques et des enseignements tirés des études de cas.
Définitions
13. Lorsqu’on élabore une législation, il est important de définir avec soin les principaux termes employés. Plusieurs recommandations concernant les définitions qui paraissent appropriées à la lumière de l’expérience de nombreux pays sont formulées ci-après. Les définitions proposées dans cette section complètent celles qui figurent déjà dans la Convention cadre de l’OMS.
« Fumée secondaire » ou « fumée environnementale »
14. Plusieurs termes différents sont communément employés pour décrire le type de fumée visé à l’article 8 de la Convention-cadre de l’OMS, par exemple « fumée secondaire », « fumée environnementale » et « fumée des autres ». Il faut éviter d’utiliser des expressions telles que « tabagisme passif » et « exposition involontaire à la fumée du tabac », car l’expérience en France et dans d’autres pays a montré que l’industrie du tabac pouvait utiliser ces termes pour étayer l’idée que l’exposition « volontaire » serait acceptable. Les expressions « fumée secondaire » et « fumée environnementale », pour lesquelles les abréviations anglaises « SHS » et « ETS » sont parfois employées, sont préférables ; dans les directives, on a choisi d’utiliser l’expression « fumée secondaire ».
15. La fumée secondaire peut être définie comme étant « la fumée produite par la combustion d’une cigarette ou d’un autre produit du tabac à laquelle s’ajoute généralement la fumée exhalée par le fumeur ».
16. « Une atmosphère sans fumée » est une atmosphère qui est à 100 % sans fumée. Cette définition s’applique, mais pas limitativement, aux atmosphères dans lesquelles on ne peut ni voir, ni sentir, ni déceler, ni mesurer de la fumée de tabac [1].
« Fumer »
17. Ce terme doit être défini comme incluant le seul fait de détenir ou d’utiliser un produit du tabac allumé, que la fumée soit ou non activement inhalée ou exhalée.
« Lieux publics »
18. La définition précise des « lieux publics » peut varier d’un pays ou territoire à l’autre, mais il est important que la législation définisse ce terme de manière aussi large que possible. La définition utilisée doit s’appliquer à tous les lieux accessibles au grand public et à tous les lieux à usage collectif, indépendamment de leur régime de propriété ou des conditions d’accès.
Lieux « intérieurs » ou « clos »
19. Aux termes de l’article 8, les lieux de travail et les lieux publics « intérieurs » doivent être protégés contre l’exposition à la fumée du tabac. Étant donné que la définition des lieux « intérieurs » peut présenter certains pièges, il y a lieu d’examiner attentivement l’expérience des différents pays en la matière. Cette définition doit être aussi large et aussi claire que possible, et il faut prendre soin de ne pas établir de listes qui pourraient être interprétées comme excluant potentiellement certains lieux « intérieurs » pertinents. Il est souhaitable que la définition des lieux « intérieurs » (ou « clos ») inclue tout espace couvert par un toit ou entouré par un ou plusieurs murs ou côtés, quels que soient les types de matériaux utilisés pour le toit, le mur ou les côtés, et qu’il s’agisse d’une structure permanente ou temporaire.
« Lieux de travail »
20. Un « lieu de travail » devrait être défini en gros comme étant « tout lieu utilisé par des personnes au cours de leur travail ou dans le cadre de leur emploi ». Par travail, on n’entend pas seulement les tâches rétribuées, mais aussi le travail volontaire s’il s’agit d’un type de travail pour lequel un salaire est normalement versé. En outre, les « lieux de travail » ne comprennent pas seulement les lieux où le travail est effectué, mais aussi tous les lieux annexes communément utilisés par les travailleurs dans le cadre de leur emploi, y compris par exemple les couloirs, ascenseurs, cages d’escalier, halls d’entrée, installations communes, cafétérias, toilettes, salons, salles de repas, ainsi que les bâtiments extérieurs comme les abris ou hangars. Les véhicules utilisés au cours du travail sont considérés comme des lieux de travail et doivent être nommément désignés comme tels.
21. Une attention particulière doit aussi être accordée aux lieux de travail qui sont également des lieux d’habitation ou de séjour tels que les prisons, les établissements pour malades mentaux ou les maisons de retraite ou de repos. Ces lieux constituent aussi des lieux de travail pour d’autres personnes qui doivent être protégées contre l’exposition à la fumée du tabac.
« Transports publics »
22. Les transports publics doivent être définis comme englobant tout véhicule utilisé pour le transport de membres du public, généralement contre rémunération ou pour réaliser un bénéfice commercial. Ils incluent les taxis.
PORTEE D’UNE LEGISLATION EFFICACE
23. L’article 8 prescrit d’adopter des mesures efficaces pour protéger les personnes contre l’exposition à la fumée du tabac dans 1) les lieux de travail intérieurs, 2) les lieux publics intérieurs, 3) les transports publics et 4) « d’autres lieux publics », « le cas échéant ».
24. Cet article crée une obligation d’assurer une protection universelle en faisant en sorte que tous les lieux publics intérieurs, tous les lieux de travail intérieurs, tous les transports publics et éventuellement d’autres lieux publics (extérieurs ou semi-ouverts) soient protégés contre l’exposition à la fumée secondaire. Aucune exception à cette règle ne peut être justifiée par des arguments sanitaires ou juridiques. Si des exceptions doivent être envisagées sur la base d’autres arguments, elles doivent être réduites au minimum. En outre, si une Partie n’est pas en mesure d’assurer immédiatement une couverture universelle, l’article 8 lui fait obligation de s’efforcer d’éliminer aussi vite que possible toutes les exceptions et de rendre la protection générale.
Chaque Partie doit s’efforcer d’assurer une protection universelle dans les cinq ans suivant l’entrée en vigueur de la Convention-cadre de l’OMS à l’égard de cette Partie.
25. Aucun niveau d’exposition à la fumée secondaire n’est sans danger et, ainsi que la Conférence des Parties l’a précédemment reconnu dans sa décision FCTC/COP1(15), les solutions techniques telles que la ventilation, l’aération (échange d’air) et la création de zones fumeurs désignées ne protègent pas contre l’exposition à la fumée du tabac.
26. La protection devrait être assurée dans tous les lieux de travail intérieurs ou clos, y compris les véhicules à moteur utilisés comme lieux de travail (par exemple les taxis, les ambulances et les véhicules de livraison).
27. Aux termes de la Convention, des mesures de protection doivent être mises en place non seulement dans tous les lieux publics « intérieurs », mais aussi, le cas échéant, dans « d’autres » lieux publics (c’est-à-dire des lieux extérieurs ou semi-ouverts). Pour déterminer quels sont les lieux publics extérieurs ou semi-ouverts dans lesquels l’application de la législation se justifie, les Parties devraient prendre en compte les données disponibles quant aux risques potentiels pour la santé existant dans ces différents environnements et faire en sorte d’adopter la protection la plus efficace contre l’exposition à la fumée du tabac lorsque les données factuelles prouvent qu’un risque existe.
INFORMER LE PUBLIC, LE CONSULTER ET L’ASSOCIER POUR GAGNER SON SOUTIEN ET FACILITER L’APPLICATION DE LA LÉGISLATION
28. Un rôle important des organismes gouvernementaux, en partenariat avec la société civile, est de sensibiliser le public et les leaders d’opinion aux risques de l’exposition à la fumée de tabac secondaire par des campagnes d’information permanentes, pour faire en sorte que la population comprenne et appuie l’action législative. Les principaux acteurs à cet égard sont les entreprises, les associations de restaurateurs et hôteliers, les groupements d’employeurs, les syndicats, les médias, les professionnels de la santé, les organisations représentant les enfants et adolescents, les institutions d’éducation et les institutions confessionnelles, la communauté des chercheurs et le grand public. L’action de sensibilisation devrait comprendre des consultations avec les secteurs affectés et avec d’autres organisations et institutions lors de l’élaboration de la législation.
29. Les principaux messages diffusés devraient mettre l’accent sur les dommages causés par l’exposition à la fumée secondaire, sur le fait que l’élimination de la fumée à l’intérieur des locaux est la seule solution scientifiquement valable pour assurer une protection complète contre l’exposition à cette fumée, sur le droit de tous les travailleurs à une égale protection de la loi et sur le fait qu’il ne peut pas y avoir de compromis entre la santé et l’économie, car l’expérience montre dans un nombre croissant de pays que les environnements sans tabac sont profitables à la fois pour la santé et pour l’économie. Les campagnes d’éducation du public devraient aussi cibler des lieux dans lesquels il n’est pas possible ou approprié d’appliquer la législation, comme les résidences privées.
30. De vastes consultations avec toutes les parties prenantes sont aussi essentielles pour éduquer et mobiliser la communauté et faciliter l’application de la loi lorsqu’elle a été promulguée. Une fois la législation adoptée, des campagnes d’éducation doivent être menées pour aider à la faire appliquer et des informations doivent être fournies aux propriétaires d’entreprises commerciales et aux gestionnaires de bâtiments pour leur expliquer le contenu de la loi et les responsabilités leur incombant. Il faut également s’occuper de produire du matériel de signalisation et d’affichage approprié. Ces mesures augmentent les chances d’obtenir que la législation soit appliquée en douceur et en grande partie volontairement. Les messages qui donnent des possibilités d’action aux non-fumeurs et remercient les fumeurs de respecter la loi sont un moyen de faire participer le public à une application en douceur de la législation.
APPLICATION DE LA LOI ET RÉPRESSION DES INFRACTIONS
Obligation de respecter la loi
31. Pour que la législation soit efficace, il faut qu’elle engage la responsabilité juridique aussi bien des fumeurs individuels que des établissements commerciaux concernés et qu’elle prévoie des peines applicables en cas d’infractions aux entreprises commerciales et, si possible, aux fumeurs eux-mêmes. Toutefois, l’action répressive devrait viser plutôt les entreprises commerciales. La législation devrait rendre le propriétaire, le gestionnaire ou toute autre personne s’occupant des locaux responsable au premier chef du respect de la loi et devrait préciser de manière claire les mesures qu’il ou elle est tenu(e) de prendre. Ces mesures devraient notamment comprendre :
a) l’obligation d’afficher à l’entrée ou dans d’autres lieux appropriés des avertissements clairs indiquant qu’il est interdit de fumer. Le format et le contenu de ces avertissements devraient être déterminés par les autorités sanitaires ou d’autres services gouvernementaux ; un numéro de téléphone ou tout autre mécanisme permettant au public de signaler les violations devraient éventuellement y être mentionnés, de même que le nom de la personne qui est chargée, sur place, de recueillir les plaintes ;
b) l’obligation de retirer tous les cendriers existant dans l’établissement ;
c) l’obligation de veiller à l’observation des règles ;
d) l’obligation de prendre les mesures raisonnables spécifiées pour dissuader le public de fumer dans l’établissement. Ces mesures pourraient consister à demander à la personne de s’abstenir de fumer, à cesser de la servir, à lui demander de quitter les lieux et à avertir les services répressifs ou toute autre autorité compétente.
Sanctions
32. La législation devrait préciser le montant des amendes ou autres sanctions financières applicables en cas de violation. Le niveau des sanctions applicables refléterait bien entendu les pratiques et coutumes spécifiques de chaque pays, mais plusieurs principes devraient guider les décisions prises à cet égard. Tout d’abord, les sanctions devraient être suffisamment lourdes pour dissuader les auteurs de violations sans quoi elles risquent de ne pas être prises au sérieux par ces personnes ou d’être considérées comme de simples coûts annexes de leurs activités. Les sanctions applicables aux entreprises qui enfreignent la loi devraient être plus importantes que celles applicables aux fumeurs individuels qui ont généralement de moindres ressources. Les sanctions devraient être plus lourdes en cas de récidive et être comparables à celles appliquées dans le même pays pour des infractions de gravité équivalente.
33. Outre les amendes, la législation peut aussi prévoir l’application de sanctions administratives telles que des suspensions de licences commerciales, conformes aux pratiques et règles juridiques du pays. Ces « sanctions de dernier recours » sont rarement utilisées mais sont très importantes pour faire respecter la loi par les entreprises qui choisissent de la braver systématiquement.
34. Des sanctions pénales peuvent également être prévues si le contexte juridique et culturel du pays s’y prête.
Services chargés de faire respecter la loi
35. La législation devrait préciser quelle est ou quelles sont la ou les autorité(s) chargée(s) de faire respecter la loi et prévoir un système permettant à la fois de surveiller l’application de la loi et de poursuivre les contrevenants.
36. La surveillance devrait comprendre des procédures d’inspection des entreprises pour vérifier qu’elles se conforment à la loi. Il est rarement nécessaire de créer un nouveau système d’inspection pour faire respecter la législation sur les environnements sans tabac. Il suffit habituellement d’utiliser un ou plusieurs des mécanismes déjà mis en place pour l’inspection des locaux commerciaux et des lieux de travail et, à cet égard, on a généralement le choix entre diverses options. Dans de nombreux pays, les inspections concernant l’application de la législation antitabac peuvent se faire dans le cadre des vérifications des licences commerciales, des inspections sanitaires et d’hygiène, et des vérifications de l’hygiène et de la sécurité des lieux de travail et de la sécurité incendie ou d’autres programmes analogues. Il peut être intéressant d’utiliser simultanément ces différentes sources d’information.
37. Lorsque cela est possible, il est recommandé de faire appel à des inspecteurs ou agents locaux, ce qui permet généralement de disposer d’un personnel plus nombreux pour faire respecter la loi et donc d’obtenir de meilleurs résultats. Cette solution nécessite de créer un mécanisme national de coordination pour assurer une cohérence à l’échelle de tout le pays.
38. Quel que soit le mécanisme utilisé, la surveillance doit s’appuyer sur un plan d’application global et comprendre un processus de formation efficace des inspecteurs. Un système de surveillance efficace peut reposer sur une combinaison d’inspections régulières et d’inspections inopinées, complétées par des visites effectuées à la suite de plaintes. Ces visites peuvent très bien être à visée éducative dans la période qui suit immédiatement l’entrée en vigueur de la loi, car la plupart des infractions sont alors souvent commises par inadvertance. La législation devrait autoriser les inspecteurs à pénétrer dans les locaux dans les conditions prévues par la loi et à y recueillir des échantillons et éléments de preuve si ces pouvoirs ne leur sont pas déjà conférés par la loi existante. De même, la législation devrait interdire aux entreprises de faire obstruction au travail des inspecteurs.
39. Le coût d’une surveillance efficace n’est pas excessif. Il n’est pas nécessaire de recruter un grand nombre d’inspecteurs, car les inspections peuvent être effectuées par du personnel et dans le cadre de programmes existants. L’expérience montre en effet que la législation sur les environnements sans tabac a tendance à être rapidement auto-appliquée (c’est-à-dire appliquée essentiellement par le public lui-même). Le nombre de poursuites nécessaires reste limité si la législation est appliquée consciencieusement et si l’on s’emploie activement à éduquer les entreprises et le public.
40. Bien que ces programmes ne soient pas très coûteux, des ressources sont nécessaires pour éduquer les chefs d’entreprise, former les inspecteurs, coordonner les inspections et rétribuer le personnel pour les inspections de locaux commerciaux effectuées en dehors des heures de travail normales. Un mécanisme de financement devrait être mis en place à cet effet. Les programmes d’inspection efficaces font appel à des sources de financement diverses, y compris des revenus fiscaux dédiés, des redevances de licence payables par les entreprises ou des prélèvements sur les amendes payées par les contrevenants.
Stratégies d’application
41. Des stratégies d’application judicieuses permettent de faire mieux respecter la loi, de simplifier sa mise en œuvre et de réduire l’ampleur de l’arsenal répressif nécessaire.
42. En particulier, l’action des services chargés de faire respecter la loi dans la période qui suit immédiatement l’entrée en vigueur de celle-ci est un facteur important aussi bien pour l’acceptation de la loi elle-même que pour le succès des mesures de surveillance et d’application futures. De nombreux pays recommandent d’appliquer dans un premier temps la loi avec souplesse. Durant cette période, les contrevenants sont mis en garde mais ne sont pas sanctionnés. Cette approche doit être combinée avec une campagne active d’information des chefs d’entreprise sur leurs responsabilités légales : ceux-ci doivent comprendre que le délai de grâce initial ou la phase d’adaptation sera suivi d’une application plus rigoureuse de la législation.
43. Pour ce qui est de la répression active, de nombreux pays recommandent de donner un large écho des poursuites engagées contre les contrevenants pour en accroître les effets dissuasifs. En débusquant les principaux délinquants qui bravent délibérément la loi ou qui sont bien connus de la communauté et en prenant des mesures fermes et rapides à leur égard et en sensibilisant au maximum le public à leurs activités, les autorités montrent leur détermination et prouvent qu’il faut prendre la loi au sérieux. Cela incite la population à respecter volontairement la législation et réduit d’autant les ressources qui doivent ensuite être consacrées à la surveillance et à l’application de la loi.
44. Bien que les lois sur les environnements sans tabac soient rapidement auto-appliquées, il n’en demeure pas moins essentiel que les autorités soient prêtes à réagir rapidement et résolument à tous les cas isolés de violation manifeste. En particulier lorsque la loi vient d’entrer en vigueur, il arrive parfois que des personnes la défient ouvertement. Une réaction très ferme en pareil cas donne un signal fort qui rend ensuite l’application de la loi plus facile, tandis que l’indécision peut rapidement conduire à des violations généralisées.
Mobiliser et associer la communauté
45. On renforce l’efficacité des programmes de surveillance et d’application de la loi en y associant la communauté. En gagnant son soutien et en encourageant les membres du public à veiller au respect de la loi et à signaler les violations, on élargit d’autant le champ d’action des services chargés de faire respecter la loi tout en réduisant les ressources dont ils ont besoin pour ce faire. En fait, dans de nombreux pays ou territoires, les plaintes du public sont le principal moyen d’obtenir que la loi soit respectée. C’est la raison pour laquelle la législation sur les environnements sans tabac doit préciser nommément que les membres du public peuvent déposer des plaintes et doit autoriser toute personne ou organisation non gouvernementale à engager une action pour imposer le respect des mesures réglementant l’exposition à la fumée secondaire. Les programmes d’application de la loi devraient comprendre la mise en place de lignes téléphoniques gratuites ou d’autres systèmes similaires pour encourager le public à signaler les violations.
SUIVI ET EVALUATION DES MESURES
46. Le suivi et l’évaluation des mesures prises pour réduire l’exposition à la fumée du tabac sont importants pour plusieurs raisons, en particulier :
a) pour inciter les responsables politiques et le public à appuyer le renforcement et l’extension des dispositions législatives ;
b) pour recueillir des données sur les succès remportés, afin d’éclairer les autres pays et de les aider dans leurs efforts ;
c) pour repérer et faire connaître les efforts faits par l’industrie du tabac pour compromettre l’application des mesures.
47. La portée et la complexité du suivi et de l’évaluation varient évidemment selon les pays, en fonction des compétences d’expert et des ressources disponibles. Toutefois, il est important d’évaluer le résultat des mesures mises en œuvre notamment en ce qui concerne l’indicateur clé constitué par l’exposition à la fumée de tabac secondaire sur les lieux de travail et dans les lieux publics. Il peut exister à cet égard des moyens d’un bon rapport coût/efficacité, consistant par exemple à utiliser les données recueillies au cours d’activités de routine telles que les inspections régulières des lieux de travail.
48. Les huit principaux indicateurs de processus et de résultats à examiner sont les suivants. [2].
Processus
a) connaissance, attitude et soutien à l’égard des politiques d’interdiction de fumer parmi le grand public et, éventuellement, dans certains groupes spécifiques, par exemple les personnes travaillant dans les bars ;
b) mise en œuvre et respect des politiques d’interdiction de fumer ;
Résultats
c) réduction de l’exposition des employés à la fumée de tabac secondaire sur les lieux de travail et dans les lieux publics ;
d) réduction de la teneur en fumée de tabac secondaire de l’air ambiant sur les lieux de travail (en particulier les restaurants) et dans les lieux publics ;
e) réduction de la mortalité et de la morbidité liées à l’exposition à la fumée de tabac secondaire ;
f) réduction de l’exposition à la fumée de tabac secondaire dans les résidences privées ;
g) évolution de la prévalence du tabagisme et modification des comportements liés au tabac ;
h) conséquences économiques.
Source : Organisation Mondiale de la Santé, Conférence des parties à la CCLAT- Lignes directrices