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La sournoise tentative de BAT

British American Tobacco souhaiterait lancer sur le marché français un nouveau produit du tabac : le snus (tabac à sucer). Présenté dans une boite métallique sous forme de petit sachet à placer entre la gencive et la lèvre supérieure, le snus est un produit très utilisé en Suède, seul pays de l’Union Européenne où sa commercialisation est autorisée. L’Union européenne avait, en effet, interdit la vente de snus en 1992, après parution d’une étude de l’OMS de 1985 effectuée en Amérique du Nord et en Europe de l’Ouest et qui concluait que l’utilisation orale de ce type de tabac était cancérigène pour l’homme.

Profitant de la présidence suédoise de l’Union Européenne, BAT a écrit au président de la République pour tenter de le convaincre d’autoriser la vente du snus sur le territoire français. Dans sa lettre, le groupe présente le snus comme « la » solution au motif qu’il serait, selon lui, un produit totalement inoffensif !

Naturellement, il n’en est rien ! Même sans fumée de tabac, le snus contient une trentaine de substances cancérigènes. Plus fort en nicotine que la cigarette, il maintient également une forte dépendance chez ses consommateurs.

Dans sa lettre, BAT met en évidence que « l’expérience suédoise » permettrait une consommation réduite (consommation la plus faible d’Europe), un taux de mortalité par cancer du poumon et de la cavité buccale le plus faible d’Europe. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) reconnaît en effet, que les Suédois ont le taux le plus bas de cancer du poumon en Europe, en partie dû au faible taux de tabagisme, mais elle ne donne pas d’argument en faveur de la substitution de la cigarette par le snus, surtout à cause des effets du snus qui ne sont pas encore connus. S’il ne semble pas y avoir d’augmentation du risque de cancers oraux ou pulmonaires, il est par contre démontré que le nombre de cancers du pancréas (1) est multiplié par deux.

Un Suédois sur cinq mâche du snus qui provoque une dépendance rapide au tabac, ce qui favorise nécessairement la consommation de tabac fumé. Un risque confirmé par une étude suédoise (2007) : Près de 2938 adolescents ont été suivis pendant sept ans. La majorité (70%) a commencé par la cigarette seule, 11% par le snus et 19% par l’association tabac-snus. Parmi les consommateurs de snus, trois sur quatre sont ensuite devenus des fumeurs réguliers de cigarettes .(2) Les études ne nient ainsi pas les avantages des produits sans fumée comme le snus, qui sont moins cancérogènes pour les consommateurs et moins nuisibles pour les non fumeurs. Certains spécialistes du contrôle du tabac pensent que normaliser sa commercialisation (interdite en UE, Australie, notamment) peut mettre à mal les politiques de contrôle de tabac.

L’industrie peut ainsi proposer un nouvel éventail de produits du tabac en ayant pour unique objectif de fidéliser une nouvelle clientèle. (Peu de fumeurs stoppent, en effet, leur consommation de tabac pour le snus)

Sur le plan publicitaire, une éventuelle commercialisation du snus serait très regrettable car ces nouveaux produits sans fumée renouvellent la capacité promotionnelle de l’industrie et ouvrent des perspectives sur la publicité apposée sur les emballages donnant à l’industrie plus d’occasions pour démultiplier la promotion des marques en attachant les produits sans fumée aux marques de cigarettes déjà existantes. Cette demande rentre dans la stratégie de communication dont l’objectif est de faire parler en bien d’un produit en le présentant comme la solution miracle et inoffensive.

Ceci permet également à l’industrie de favoriser l’utilisation de produits sans fumée dans des endroits où la fumée de tabac est interdite (des endroits où les fumeurs sont obligés de restreindre/diminuer leur consommation…) et contribue ainsi à augmenter la dépendance aux produits du tabac. Pire, le snus peut être une véritable passerelle vers la cigarette pour les plus jeunes qui deviendront vite dépendants comme le démontre l’étude Suédoise.

A l’aube du Plan cancer 2, il parait totalement incohérent d’autoriser un produit tel que le snus en arguant une baisse des cancers du poumon tout en oubliant de parler du doublement des cancers du pancréas ! Par ailleurs, favoriser l’entrée des plus jeunes dans le tabagisme va à l’encontre des objectifs de la politique de santé publique française.

Il est nécessaire de rester extrêmement vigilant face à cette nouvelle menace et DNF y veillera.

Sources 1. Luo J, Ye M, Zendehdel K et Als, Oral use of Swedish moist snuff (snus) and risk for cancer of the mouth, lung, and pancreas in male construction workers : a retrospective cohort study [archive] , Lancet, 2007 ;369:2015-2020

2.The Development of Tobacco Use in Adolescence Among « Snus Starters » and « Cigarette Starters » : An Analysis of the Swedish « BROMS » Cohort Maria Rosaria Galanti, M.D., Ph.D., Ingvar Rosendahl, Ph.D. and Seppo Wickholm, D.D.S. Tobacco Prevention, Stockholm Centre for Public Health, and Clinical Epidemiology Unit, Department of Medicine, Karolinska Institutet Tobacco Prevention, Stockholm Centre for Public Health McNeil Sweden AB and Institute of Odontology, Karolinska Institutet Stockholm, Sweden, in Nicotine and Tobacco Research, Vol 10 pp. 315-323 http://ntr.oxfordjournals.org/cgi/c...

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