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Droit à l’air pur et liberté individuelle du fumeur Imprimer la question

Ce n’est pas une question, c’est une explication. Mon Htag sur Europe 1 vous a déstabilisé. Du 2e degré en quelques mots, et dans ce contexte, c’est pas une bonne idée, mais au moins on a parlé en public de la notion de « droit à l’air pur ». Ceux qui me connaissent m’auront reconnus.

Je tiens à m’expliquer en prenant mon temps.

A 20 ans j’ai fait partie de la LCFTP ( Ligue contre la fumée de tabac en public - déjà, je leur disais que leur acronyme n’était pas porteur) et je me réjouis aujourd’hui des progrès pour les non fumeurs. Mais par ce message qui commençais par « Marre des interdits », je voulais dire que comme beaucoup et certainement plus que beaucoup, je suis très attachée aux libertés. Et donc que je comprends ceux qui réagissent comme ça.

Je pense que s’attaquer au problème en demandant des interdictions est contre productif. Cela monte les fumeurs contre les non fumeurs. Alors ce que je demande personnellement, c’est qu’on ne me pollue pas l’air. Ni avec du tabac, ni avec des odeurs pas choisies, ni avec du bruit, ni avec des éclairages éblouissants, bref, que les autres respectent mon DROIT A MA LIBERTÉ DE RESPIRER DE L’AIR PUR.

Je pense que cette façon de voir serait plus productive. Ce ne serait plus les fumeurs qui passeraient pour des victimes.

Il me semble que ça existe pour le bruit (même avant 22 H on n’a pas le droit de gêner un voisin). Il faut que les fumeurs se rendent compte que les agresseurs, c’est eux. Et les victimes, nous. Depuis l’interdiction, il nous est interdit de fait, de déjeuner ou de prendre un pot en terrasse, les spectacles en plein air nous sont aussi interdits (on dirait qu’ils se vengent). En sortant d’un hôpital, je prends une grande respiration et franchis le seuil en apnée. Même en marchant dans la rue, je dois parfois m’arrêter et laisser filer la personne qui fume devant moi. Bref, encore une interdiction de marcher le nez en l’air. Et on n’arrivera jamais à empêcher tout ça en légiférant.

Revendiquer le droit à l’air pur ne nécessiterait plus de se poser la question des E-cigarettes.

Certes, les contrôles et les interventions de police seraient ultra plus difficiles. Mais combien de fois la police est-elle intervenue contre des fumeurs depuis que la loi d’interdiction existe ? Je pense qu’une réelle prise de conscience est nécessaire, et c’est pour ça que moi aussi, j’en ai marre des interdictions. Je suis pour les permissions. Permission de fumer partout où vous êtes sûre de gêner personne.

Je pense que le message passerait bien mieux.

Il faudrait faire ENTRER LE DROIT A L’AIR PUR DANS LA CONSTITUTION. Les gens sont sensibles aux slogans sur le droit au travail ou au logement. Le droit à l’air pur me semble encore plus évident. Il faut en parler.

D’ailleurs, que font les écologistes. Ils devraient être les premiers sur le coup.

Ah j’oubliais, ils arrachent les OGM la pipe à la bouche.

Juste un truc en plus sur la présentation. Je sais comment fonctionnent ces associations et le temps et les difficultés du bénévolat. On vous a mis, vous le représentant de l’association, devant un micro face à des milliers d’auditeurs et, avec toute la sympathie que j’ai pour vous, j’avais l’impression qu’on vous jetait dans la fosse aux lions.

J’ai 63 ans, suis de nature timide et sais mal m’exprimer en public. Votre silence à la lecture de mon message m’a touchée. Mais, je peux me tromper, j’ai eu l’impression que vous ne compreniez pas que j’étais dans votre camp. Et à vrai dire, dans votre situation, j’aurais été tout aussi scotchée. D’ailleurs, si j’ai écrit un message plutôt que de téléphoner, c’est bien parce-que je perds mes moyens en public. Je pense que pour communiquer il aurait été bien d’envoyer un jeune, qui ait de la répartie, de l’humour. Pour montrer qu’être non fumeur, c’est pas ringard. J’espère qu’il y en a dans l’association.

Pour le côté ringard ? A 24 ans, je me suis trouvée pionne dans un collège. A la récrée, des ados m’ont provoquée. « vous voulez une cigarette, madame ?’. Je les ai regardées dédaigneusement et disant »non merci, j’ai passé l« âge. C’est pour des gamines qui veulent passer pour des grandes, ça ». Elles n’ont pas su quoi répondre. Je ne sais pas si ça les a fait réfléchir, mais j’ai toujours été une fille, puis une femme très « branchée » et ringardiser la cigarette me semblerait aussi une bonne orientation.

Bonne continuation.

Chantal

Réponse :

Il y a eu, effectivement, une intervention, lors de cette émission, qui parlait à la fois de « marre des interdits », de liberté individuelle du fumeur et de droit à l’air pur de celui qu’il côtoie. Cette intervention se situait dans une démarche aussi ambiguë qu’irréaliste et demeure un des arguments principaux des fabricants de tabac et de leurs fidèles serviteurs ; elle consiste à accorder une prééminence à la liberté incontrôlée d’une frange des fumeurs qui ne représente pas 5% de la population et à refuser au reste de cette population son droit légitime à ne pas subir les désagréments de la pratique tabagique.

Dans un monde idéal, la loi ne devrait pas exister mais nous vivons dans un monde de plus en plus dominé par l’individualisme ; la loi demeure donc le seul moyen efficace de créer les conditions de vie en collectivité. A titre d’exemple, la loi Évin instituait, dès 1991, le principe de la protection des personnes qui souhaitaient voir respecter leur droit à l’air pur. Bernard Kouchner, par le décret de 1992, laissait aux cafetiers et restaurateurs la possibilité d’organiser cette protection tout en respectant les libertés individuelles des fumeurs. Or, dans la réalité, les cafés et restaurants sont devenus des espaces dédiés aux fumeurs dans lesquels il était totalement impossible de trouver la moindre parcelle d’air sans pollution tabagique ; il a fallu attendre 2006 et le décret de Xavier Bertrand, pour que l’irréaliste incitation au civisme soit remplacée par une règlementation qui a, évidemment, réduit la liberté individuelle du fumeur pour permettre de pouvoir, à nouveau fréquenter ces espaces de convivialité.

Il faut effectivement faire prioritairement appel à la prévention et au civisme individuel, mais lorsque cela ne suffit pas, il faut en passer par la loi. Les individus préfèrent exercer leurs libertés individuelles dans un cadre règlementaire souple plutôt que de devoir retourner à la loi de la jungle.

GA 

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