Directive 89/552/CEE du Conseil du 3 octobre 1989
Journal officiel n° L 298 du 17/10/1989 p. 0023 - 0030
DIRECTIVE DU CONSEIL
du 3 octobre 1989
visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l’exercice d’activités de radiodiffusion télévisuelle
(89/552/CEE)
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 57 paragraphe 2 et son article 66,
vu la proposition de la Commission (1),
en coopération avec le Parlement européen (2),
vu l’avis du Comité économique et social (3),
considérant que les objectifs de la Communauté, tels qu’ils sont énoncés dans le traité, consistent à réaliser une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens, à établir des relations plus étroites entre les États que la Communauté réunit, à assurer par une action commune le progrès économique et social des pays en éliminant les barrières qui divisent l’Europe, à promouvoir l’amélioration constante des conditions de vie de ses peuples, ainsi qu’à veiller à la sauvegarde et à l’affermissement de la paix et de la liberté ;
considérant que le traité prévoit l’établissement d’un marché commun comportant l’abolition, entre les États membres, des obstacles à la libre circulation des services et l’établissement d’un régime assurant que la concurrence n’est pas faussée ;
considérant que les émissions transfrontières réalisées grâce aux différentes technologies sont l’un des moyens permettant de poursuivre les objectifs de la Communauté ; qu’il convient d’adopter des mesures assurant le passage des marchés nationaux à un marché commun de production et de distribution de programmes et créant des conditions de concurrence loyale sans préjudice de la fonction d’intérêt public qui incombe aux services de radiodiffusion télévisuelle ;
considérant que le Conseil de l’Europe a adopté la convention européenne sur la télévision transfrontière ;
considérant que le traité prévoit l’adoption de directives en vue de la coordination des dispositions destinées à faciliter l’accès aux activités non salariées ;
considérant que la radiodiffusion télévisuelle constitue, dans des circonstances normales, un service au sens du traité ;
considérant que le traité prévoit la libre circulation de tous les services fournis normalement contre rémunération, sans exclusion liée à leur contenu culturel ou autre et sans restriction à l’égard des ressortissants des États membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire du service ;
considérant que ce droit appliqué à la diffusion et à la distribution de services de télévision est aussi une manifestation spécifique, en droit communautaire, d’un principe plus général, à savoir la liberté d’expression telle qu’elle est consacrée par l’article 10 paragraphe 1 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ratifiée par tous les États membres ; que, pour cette raison, l’adoption de directives concernant l’activité de diffusion et de distribution de programmes de télévision doit assurer le libre exercice de cette activité à la lumière dudit article, sous réserve des seules limites prévues au paragraphe 2 du même article et à l’article 56 paragraphe 1 du traité ;
considérant que les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres applicables à l’exercice d’activités de radiodiffusion télévisuelle et de distribution par câble présentent des disparités dont certaines sont susceptibles d’entraver la libre circulation des émissions dans la Communauté et de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun ;
considérant que toutes ces entraves à la libre diffusion à l’intérieur de la Communauté doivent être supprimées en vertu du traité ;
considérant que cette suppression doit aller de pair avec une coordination des législations applicables ; que celle-ci doit avoir pour objet de faciliter l’exercice des activités professionnelles concernées et, plus généralement, la libre circulation des informations et des idées à l’intérieur de la Communauté ;
considérant que, dès lors, il est nécessaire et suffisant que toutes les émissions respectent la législation de l’État membre dont elles émanent ;
considérant que la présente directive prévoit les dispositions minimales nécessaires pour assurer la libre diffusion des émissions ; que, de ce fait, elle n’affecte pas les compétences que possèdent les États membres et leurs autorités en ce qui concerne l’organisation - y compris les systèmes de concession, d’autorisation administrative ou de taxation - et le financement des émissions, ainsi que le contenu des programmes ; que l’indépendance de l’évolution culturelle d’un État membre à l’autre et la diversité culturelle de la Communauté restent ainsi préservées ;
considérant qu’il est nécessaire, dans le cadre du marché commun, que toutes les émissions émanant de la Communauté et destinées à être captées à l’intérieur de celle-ci, et notamment les émissions destinées à un autre État membre, respectent la législation de l’État membre d’origine applicable aux émissions destinées au public dans cet État membre, ainsi que les dispositions de la présente directive ;
considérant que l’obligation de l’État membre d’origine de s’assurer que des émissions sont conformes à la législation nationale telle que coordonnée par la présente directive est suffisante, au regard du droit communautaire, pour garantir la libre circulation des émissions sans qu’un second contrôle pour les mêmes motifs soit nécessaire dans les États membres de réception ; que, toutefois, l’État membre de réception peut, à titre exceptionnel et dans des conditions déterminées, suspendre provisoirement la retransmission d’émissions télévisées ;
considérant qu’il est essentiel que les États membres veillent à ce que soient évités des actes préjudiciables à la libre circulation et au commerce des émissions télévisées ou susceptibles de favoriser la formation de positions dominantes qui imposeraient des limites au pluralisme et à la liberté de l’information télévisée ainsi que de l’information dans son ensemble ;
considérant que la présente directive, en se limitant à une réglementation visant spécifiquement la radiodiffusion télévisuelle, ne préjuge pas les actes communautaires d’harmonisation en vigueur ou futurs ayant notamment pour objet de faire respecter les impératifs concernant la défense des consommateurs, la loyauté des transactions commerciales et la concurrence ;
considérant qu’une coordination est cependant nécessaire pour assurer aux personnes et aux industries productrices de programmes télévisés à vocation culturelle un meilleur accès à la profession et à son exercice ;
considérant que des exigences minimales applicables à tous les programmes télévisés, publics ou privés de la Communauté en ce qui concerne les productions audiovisuelles européennes sont un moyen permettant de promouvoir la production, la production indépendante et la distribution dans les industries susmentionnées et complètent d’autres instruments qui ont été ou seront proposés dans le même sens ;
considérant qu’il importe dès lors de promouvoir la formation de marchés qui aient une taille suffisante pour que les productions télévisuelles des États membres puissent amortir les investissements nécessaires, non seulement en établissant des règles communes ouvrant les marchés nationaux les uns aux autres, mais aussi, chaque fois que cela est réalisable, en oeuvrant par les moyens appropriés pour que les productions européennes soient majoritaires dans les programmes de télévision des États membres ; que, pour permettre l’application de ces règles et la poursuite de ces objectifs, les États membres doivent faire rapport à la Commission sur la réalisation de la proportion que la présente directive prévoit de réserver aux oeuvres européennes et aux productions indépendantes ; que, pour le calcul de cette proportion, il convient de tenir compte de la situation particulière de la République hellénique et de la République portugaise ; que la Commission doit porter le rapport de chaque État membre à la connaissance des autres en l’assortissant, le cas échéant, d’un avis tenant compte, notamment, du progrès réalisé par rapport aux années précédentes, de la part que les oeuvres de première diffusion représentent dans la programmation, des circonstances particulières des nouveaux organismes de télédiffusion et de la situation spécifique des pays à faible capacité de production audiovisuelle ou à aire linguistique restreinte ;
considérant que, aux fins susvisées, il y a lieu de définir les « oeuvres européennes » sans préjudice de la possibilité pour les États membres de préciser cette définition en ce qui concerne des organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence conformément à l’article 3 paragraphe 1, dans le respect du droit communautaire et compte tenu des objectifs de la présente directive ;
considérant qu’il importe de rechercher les instruments et procédures appropriés et conformes au droit communautaire qui favorisent la réalisation de ces objectifs en vue de l’adoption des mesures qui s’imposent pour encourager l’activité et le développement de la production et de la distribution audiovisuelles européennes, notamment dans les pays à faible capacité de production ou à aire linguistique restreinte ; considérant que des dispositifs nationaux de soutien au développement de la production européenne pourront être appliqués dans la mesure où ils sont conformes au droit communautaire ;
considérant que le fait de s’engager à diffuser, dans la mesure du possible, une certaine proportion d’oeuvres indépendantes réalisées par des producteurs indépendants des organismes de radiodiffusion télévisuelle encouragera l’apparition de nouvelles sources de production télévisuelle, notamment la création de petites et moyennes entreprises ; qu’il en résultera de nouvelles possibilités et de nouveaux débouchés pour le génie créatif, pour les professions culturelles et pour les travailleurs du secteur de la cuture ; que, en définissant la notion de producteur indépendant, les États membres devront tenir compte de cet objectif et, pour cela, accorder toute l’attention voulue aux petites et moyennes entreprises de production et veiller à rendre possible la participation financière des sociétés de coproduction filiales des organismes de radiodiffusion télévisuelle ;
considérant que des mesures sont nécessaires pour permettre aux États membres de veiller à une certaine chronologie entre la première diffusion cinématographique d’une oeuvre et la première diffusion télévisuelle ;
considérant que, dans le souci de promouvoir activement telle ou telle langue, les États membres doivent conserver la faculté de fixer des règles plus strictes ou plus détaillées en fonction de critères linguistiques, pour autant que ces règles respectent le droit communautaire et, notamment, ne soient pas applicables à la retransmission de programmes originaires d’autres États membres ;
considérant que, pour assurer de façon complète et adéquate la protection des intérêts des consommateurs que sont les téléspectateurs, il est essentiel que la publicité télévisée soit soumise à un certain nombre de normes minimales et de critères, et que les États membres aient la faculté de fixer des règles plus strictes ou plus détaillées et, dans certains cas, des conditions différentes pour les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence ;
considérant que, tout en respectant le droit communautaire, les États membres doivent pouvoir fixer, pour les émissions destinées uniquement au territoire national qui ne peuvent être reçues, directement ou indirectement, dans un ou plusieurs autres États membres, d’autres conditions relatives à l’insertion de la publicité et d’autres limites applicables au volume de publicité afin de favoriser la diffusion de ce type d’émissions ;
considérant qu’il y a lieu d’interdire toute publicité télévisée pour les cigarettes et les autres produits du tabac, y compris les formes indirectes de publicité qui, sans faire directement mention du produit, essaient de tourner l’interdiction de publicité en utilisant des noms de marque, des symboles ou d’autres traits distinctifs de produits de tabac ou d’entreprises dont les activités connues ou principales comprennent la production ou la vente de tels produits ;
considérant qu’il est également nécessaire d’interdire toute publicité télévisée pour les médicaments et les traitements médicaux uniquement disponibles sur prescription médicale dans l’État membre de la compétence duquel relève l’organisme de radiodiffusion télévisuelle, ainsi que de prévoir des critères stricts en matière de publicité télévisée pour les boissons alcooliques ;
considérant que, étant donné l’importance croissante du parrainage dans le financement des programmes, il convient d’établir des règles appropriées à ce sujet ;
considérant qu’il est en outre nécessaire de prévoir des règles pour la protection de l’épanouissement physique, mental et moral des mineurs dans des programmes et dans la publicité télévisée ;
considérant que, si les organismes de radiodiffusion télévisuelle sont normalement tenus de veiller à ce que les émissions présentent loyalement les faits et les événements, il importe cependant de les soumettre à des obligations précises en matière de droit de réponse ou de mesures équivalentes pour que toute personne lésée dans des droits légitimes à la suite d’une allégation faite au cours d’une émission télévisée puisse effectivement faire valoir ces droits,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE :
CHAPITRE I
Définitions
Article premier
Aux fins de la présente directive, on entend par :
a) « radiodiffusion télévisuelle » l’émission primaire, avec ou sans fil, terrestre ou par satellite, codée ou non, de programmes télévisés destinés au public. Est visée la communication de programmes entre entreprises en vue d’une rediffusion à l’intention du public. Ne sont pas visés les services de communications fournissant, sur appel individuel, des éléments d’information ou d’autres prestations, tels que les services de télécopie, les banques de données électroniques et autres services similaires ;
b) « publicité télévisée » toute forme de message télévisé contre rémunération ou paiement similaire par une entreprise publique ou privée dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale ou de profession libérale dans le but de promouvoir la fourniture, contre paiement, de biens ou de services, y compris les biens immeubles, les droits et les obligations.
Sauf pour les fins visées par l’article 18, cela n’inclut pas les offres directes au public en vue de la vente, de l’achat ou de la location de produits ou en vue de la fourniture de services contre rémunération ;
c) « publicité clandestine » la présentation verbale ou visuelle de marchandises, de services, du nom, de la marque ou des activités d’un producteur de marchandises ou d’un prestataire de services dans des programmes, lorsque cette présentation est faite de façon intentionnelle par l’organisme de radiodiffusion télévisuelle dans un but publicitaire et risque d’induire le public en erreur sur la nature d’une telle présentation. Une présentation est considérée intentionnelle notamment lorsqu’elle est faite contre rémunération ou paiement similaire ;
d) « parrainage » toute contribution d’une entreprise publique ou privée, n’exerçant pas d’activités de radiodiffusion télévisuelle ou de production d’œuvres audiovisuelles, au financement de programmes télévisés, dans le but de promouvoir son nom, sa marque, son image, ses activités ou ses réalisations.
CHAPITRE II
Dispositions générales
Article 21. Chaque État veille à ce que toutes les émissions de radiodiffusion télévisuelle transmises :
- par des organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de sa compétence
ou
- par des organismes de radiodiffusion télévisuelle utilisant une fréquence ou la capacité d’un satellite accordée par cet État membre ou une liaison montante vers un satellite située dans cet État membre, tout en ne relevant de la compétence d’aucun État membre,
respectent le droit applicable aux émissions destinées au public dans cet État membre.
2. Les États membres assurent la liberté de réception et n’entravent pas la retransmission sur leur territoire d’émissions de radiodiffusion télévisuelle en provenance d’autres États membres pour des raisons qui relèvent des domaines coordonnés par la présente directive. Ils peuvent suspendre provisoirement la retransmission d’émissions télévisées si les conditions suivantes sont remplies :
a) une émission télévisée en provenance d’un autre État membre enfreint d’une manière manifeste, sérieuse et grave l’article 22 ;
b) au cours des douze mois précédents, l’organisme de radiodiffusion télévisuelle a déjà enfreint, deux fois au moins, la même disposition ;
c) l’État membre concerné a notifié par écrit à l’organisme de radiodiffusion télévisuelle et à la Commission les violations alléguées et son intention de restreindre la retransmission au cas où une telle violation surviendrait de nouveau ;
d) les consultations avec l’État de transmission et la Commission n’ont pas abouti à un règlement amiable, dans un délai de quinze jours à compter de la notification prévue au point c), et la violation alléguée persiste.
La Commission veille à la compatibilité de la suspension avec le droit communautaire. Elle peut demander à l’État membre concerné de mettre fin d’urgence à une suspension contraire au droit communautaire. Cette disposition n’affecte pas l’application de toute procédure, mesure ou sanction aux violations en cause dans l’État membre de la compétence duquel relève l’organisme de radiodiffusion télévisuelle concerné.
3. La présente directive ne s’applique pas aux émissions de radiodiffusion télévisuelle exclusivement destinées à être captées dans d’autres États que les États membres et qui ne sont pas reçues directement ou indirectement dans un ou plusieurs États membres.
Article 3
1. Les États membres ont la faculté, en ce qui concerne les organismes de radiodiffusion télévisuelle qui relèvent de leur compétence, de prévoir des règles plus strictes ou plus détaillées dans les domaines couverts par la présente directive.
2. Les États membres veillent, par les moyens appropriés, dans le cadre de leur législation, au respect, par les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence, des dispositions de la présente directive.
CHAPITRE III
Promotion de la distribution et de la production de programmes télévisés
Article 4
1. Les États membres veillent chaque fois que cela est réalisable et par des moyens appropriés, à ce que les organismes de radiodiffusion télévisuelle réservent à des œuvres européennes, au sens de l’article 6, une proportion majoritaire de leur temps de diffusion, à l’exclusion du temps consacré aux informations, à des manifestations sportives, à des jeux, à la publicité ou aux services de télétexte. Cette proportion, compte tenu des responsabilités de l’organisme de radiodiffusion télévisuelle à l’égard de son public en matière d’information, d’éducation, de culture et de divertissement, devra être obtenue progressivement sur la base de critères appropriés.
2. Lorsque la proportion définie au paragraphe 1 ne peut être atteinte, elle ne doit pas être inférieure à celle qui est constatée en moyenne en 1988 dans l’État membre concerné.
Néanmoins, en ce qui concerne la République hellénique et la République portugaise, l’année 1988 est remplacée par l’année 1990. 3. À partir du 3 octobre 1991, les États membres communiquent à la Commission, tous les deux ans, un rapport sur l’application du présent article et de l’article 5.
Ce rapport comporte notamment un relevé statistique de la réalisation de la proportion visée au présent article et à l’article 5 pour chacun des programmes de télévision relevant de la compétence de l’État membre concerné, les raisons pour lesquelles, dans chacun des cas, il n’a pas été possible d’atteindre cette proportion, ainsi que les mesures adoptées ou envisagées pour l’atteindre.
La Commission porte ces rapports à la connaissance des autres États membres et du Parlement européen, accompagnés éventuellement d’un avis. Elle veille à l’application du présent article et de l’article 5 conformément aux dispositions du traité. Dans son avis, elle peut tenir compte notamment du progrès réalisé par rapport aux années précédentes, de la part que les oeuvres de première diffusion représentent dans la programmation, des circonstances particulières des nouveaux organismes de radiodiffusion télévisuelle et de la situation spécifique des pays à faible capacité de production audiovisuelle ou à aire linguistique restreinte.
4. Le Conseil réexamine la mise en oeuvre du présent article sur la base d’un rapport de la Commission, assorti des propositions de révision que celle-ci estimerait appropriées, au plus tard à la fin de la cinquième année à compter de l’adoption de la présente directive.
À cette fin, le rapport de la Commission tiendra compte notamment, sur la base des informations communiquées par les États membres en application du paragraphe 3, de l’évolution intervenue dans le marché communautaire, ainsi que du contexte international.
Article 5
Les États membres veillent, chaque fois que cela est réalisable et par des moyens appropriés, à ce que les organismes de radiodiffusion télévisuelle réservent au moins 10 % de leurs temps d’antenne, à l’exclusion du temps consacré aux informations, à des manifestations sportives, à des jeux, à la publicité ou aux services de télétexte, ou alternativement, au choix de l’État membre, 10 % au moins de leur budget de programmation, à des oeuvres européennes émanant de producteurs indépendants d’organismes de radiodiffusion télévisuelle. Cette proportion, compte tenu des responsabilités des organismes de radiodiffusion télévisuelle à l’égard de leur public en matière d’information, d’éducation, de culture et de divertissement, devra être obtenue progressivement sur la base de critères appropriés ; elle doit être atteinte en réservant une proportion adéquate à des oeuvres récentes, c’est-à-dire des oeuvres diffusées dans un laps de temps de cinq ans après leur production.
Article 6
1. Aux fins du présent chapitre, on entend par « œuvres européennes » les œuvres suivantes :
a) les oeuvres originaires d’États membres de la Communauté et, en ce qui concerne les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence de la république fédérale d’Allemagne, les oeuvres originaires des territoires allemands où la loi fondamentale n’est pas d’application qui répondent aux conditions du paragraphe 2 ;
b) les oeuvres originaires d’États tiers européens parties à la convention européenne sur la télévision transfrontière du Conseil de l’Europe et répondant aux conditions du paragraphe 2 ;
c) les oeuvres originaires d’autres États tiers européens et répondant aux conditions du paragraphe 3.
2. Les oeuvres visées au paragraphe 1 points a) et b) sont des oeuvres qui sont réalisées essentiellement avec le concours d’auteurs et de travailleurs résidant dans un ou plusieurs États visés au même paragraphe points a) et b) et qui répondent à l’une des trois conditions suivantes :
a) elles sont réalisées par un ou des producteurs établis dans un ou plusieurs de ces États ;
b) la production de ces oeuvres est supervisée et effectivement contrôlée par un ou plusieurs producteurs établis dans un ou plusieurs de ces États ;
c) la contribution des coproducteurs de ces États est majoritaire dans le coût total de la coproduction, et celle-ci n’est pas contrôlée par un ou plusieurs producteurs établis en dehors de ces États.
3. Les oeuvres visées au paragraphe 1 point c) sont les oeuvres qui sont réalisées soit exclusivement, soit en coproduction avec les producteurs établis dans un ou plusieurs États membres, par des producteurs établis dans un ou plusieurs pays tiers européens avec lesquels la Communauté conclura des accords selon les procédures prévues par le traité si ces oeuvres sont réalisées essentiellement avec le concours d’auteurs ou de travailleurs résidant dans un ou plusieurs États européens.
4. Les oeuvres qui ne sont pas des oeuvres européennes au sens du paragraphe 1, mais qui sont réalisées essentiellement avec le concours d’auteurs et de travailleurs résidant dans un ou plusieurs États membres, sont considérées comme des oeuvres européennes au prorata de la part des coproducteurs communautaires dans le coût total de la production.
Article 7
Les États membres veillent à ce que les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence ne procèdent à aucune diffusion d’œuvres cinématographiques, sauf accord contraire entre les détenteurs de droits et l’organisme de radiodiffusion télévisuelle, avant l’expiration d’un délai de deux ans après le début de l’exploitation de cette œuvre dans les salles de cinéma dans un des États membres de la Communauté ; dans le cas d’œuvres cinématographiques coproduites par l’organisme de radiodiffusion télévisuelle, ce délai est d’un an. Article 8
Lorsqu’ils l’estiment nécessaire pour la réalisation d’objectifs de politique linguistique, les États membres ont la faculté, à condition de respecter le droit communautaire, de prévoir, en ce qui concerne certaines ou l’ensemble des émissions des organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence, des règles plus détaillées ou plus strictes, notamment en fonction de critères linguistiques.
Article 9
Le présent chapitre ne s’applique pas aux émissions de télévision à caractère local qui ne font pas partie d’un réseau national.
CHAPITRE IV
Publicité télévisée et parrainage
Article 10
1. La publicité télévisée doit être aisément identifiable comme telle et être nettement distincte du reste du programme grâce à des moyens optiques et/ou acoustiques.
2. Les spots publicitaires isolés doivent être exceptionnels.
3. La publicité ne doit pas utiliser des techniques subliminales.
4. La publicité clandestine est interdite.
Article 11
1. La publicité doit être insérée entre les émissions. Sous réserve des conditions fixées aux paragraphes 2 à 5, la publicité peut également être insérée pendant des émissions, de façon à ne pas porter atteinte à l’intégrité et à la valeur des émissions en tenant compte des interruptions naturelles du programme ainsi que de sa durée et de sa nature, et de manière à ce qu’il ne soit pas porté préjudice aux droits des ayants droit.
2. Dans les émissions composées de parties autonomes ou dans les émissions sportives et les évènements et spectacles de structure similaire comprenant des intervalles, la publicité ne peut être insérée qu’entre les parties autonomes ou dans les intervalles.
3. La transmission d’œuvres audiovisuelles telles que les longs métrages cinématographiques et les films conçus pour la télévision (à l’exclusion des séries, des feuilletons, des émissions de divertissement et des documentaires), à condition que leur durée programmée soit supérieure à quarante-cinq minutes, peut être interrompue une fois par tranche complète de quarante-cinq minutes. Une autre interruption est autorisée si leur durée programmée est supérieure d’au moins vingt minutes à deux ou plusieurs tranches complètes de quarante-cinq minutes.
4. Lorsque des émissions autres que celles couvertes par le paragraphe 2 sont interrompues par la publicité, une période d’au moins vingt minutes devrait s’écouler entre chaque interruption successive à l’intérieur des émissions.
5. La publicité ne peut être insérée dans les diffusions de services religieux. Les journaux télévisés, les magazines d’actualités, les documentaires, les émissions religieuses et les émissions pour enfants, dont la durée programmée est inférieure à trente minutes, ne peuvent être interrompus par la publicité. Lorsqu’ils ont une durée programmée d’au moins trente minutes, les dispositions des paragraphes précédents s’appliquent.
Article 12
La publicité télévisée ne doit pas :
a) porter atteinte au respect de la dignité humaine ;
b) comporter de discrimination en raison de la race, du sexe ou de la nationalité ;
c) attenter à des convictions religieuses ou politiques ;
d) encourager des comportements préjudiciables à la santé ou à la sécurité ;
e) encourager des comportements préjudiciables à la protection de l’environnement.
Article 13
Toute forme de publicité télévisée pour les cigarettes et les autres produits de tabac est interdite.
Article 14
La publicité télévisée pour les médicaments et les traitements médicaux qui sont seulement disponibles sur prescription médicale dans l’État membre de la compétence duquel relève l’organisme de radiodiffusion télévisuelle est interdite.
Article 15
La publicité télévisée pour les boissons alcooliques doit respecter les critères suivants :
a) elle ne peut pas être spécifiquement adressée aux mineurs et, en particulier, présenter des mineurs consommant ces boissons ;
b) elle ne doit pas associer la consommation d’alcool à une amélioration des performances physiques ou à la conduite automobile ;
c) elle ne doit pas susciter l’impression que la consommation d’alcool favorise la réussite sociale ou sexuelle ;
d) elle ne doit pas suggérer que les boissons alcooliques sont dotées de propriétés thérapeutiques ou ont un effet stimulant, sédatif ou anticonflictuel ;
e) elle ne doit pas encourager la consommation immodérée de boissons alcooliques ou donner une image négative de l’abstinence ou de la sobriété ;
f) elle ne doit pas souligner comme qualité positive des boissons leur forte teneur en alcool.
Article 16
La publicité télévisée ne doit pas porter un préjudice moral ou physique aux mineurs et doit, de ce fait, respecter les critères suivants pour leur protection : a) elle ne doit pas inciter directement les mineurs à l’achat d’un produit ou d’un service, en exploitant leur inexpérience ou leur crédulité ;
b) elle ne doit pas inciter directement les mineurs à persuader leurs parents ou des tiers d’acheter les produits ou les services concernés ;
c) elle ne doit pas exploiter la confiance particulière que les mineurs ont dans leurs parents, leurs enseignants ou d’autres personnes ;
d) elle ne doit pas, sans motif, présenter des mineurs en situation dangereuse.
Article 17
1. Les programmes télévisés parrainés doivent répondre aux exigences suivantes :
a) le contenu et la programmation d’une émission parrainée ne peuvent, en aucun cas, être influencés par le parrain de manière à porter atteinte à la responsabilité et à l’indépendance éditoriale de l’organisme de radiodiffusion télévisuelle à l’égard des émissions ;
b) ils doivent être clairement identifiés en tant que tels par le nom et/ou le logo du parrain au début et/ou à la fin des programmes ;
c) ils ne doivent pas inciter à l’achat ou à la location des produits ou services du parrain ou d’un tiers, en particulier en faisant des références promotionnelles spécifiques à ces produits ou services.
2. Les programmes télévisés ne peuvent être parrainés par des personnes physiques ou morales qui ont pour activité principale la fabrication ou la vente de produits ou la fourniture de services dont la publicité est interdite en vertu des articles 13 ou 14.
3. Les journaux télévisés et les émissions d’information politique ne peuvent être parrainés.
Article 18
1. Le temps de transmission consacré à la publicité ne doit pas dépasser 15 % du temps de transmission quotidien. Toutefois, ce pourcentage peut être porté à 20 % s’il comprend des formes de publicité telles que les offres faites directement au public en vue soit de vendre, d’acheter ou de louer des produits, soit de fournir des services, à condition que le volume des spots publicitaires ne dépasse pas 15 %.
2. Le temps de transmission consacré aux spots publicitaires à l’intérieur d’une période donnée d’une heure ne doit pas dépasser 20 %.
3. Sans préjudice des dispositions du paragraphe 1, les formes de publicité telles que les offres faites directement au public en vue soit de vendre, d’acheter ou de louer des produits, soit de fournir des services, ne doivent pas dépasser une heure par jour.
Article 19
Les États membres peuvent prévoir des règles plus strictes que celles de l’article 18 pour le temps d’antenne et les modalités de transmission télévisée des organismes de radiodiffusion télévisuelle qui relèvent de leur compétence, de manière à concilier la demande en publicité télévisée avec les intérêts du public, compte tenu notamment :
a) de la fonction d’information, d’éducation, de culture et de divertissement de la télévision ;
b) de la sauvegarde du pluralisme de l’information et des médias.
Article 20
Sans préjudice de l’article 3, les États membres peuvent prévoir, dans le respect du droit communautaire, des conditions autres que celles fixées à l’article 11 paragraphes 2 à 5 et à l’article 18 pour les émissions qui sont destinées uniquement au territoire national et qui ne peuvent être reçues, directement ou indirectement, dans un ou plusieurs autres États membres.
Article 21
Les États membres veillent, dans le cadre de leur législation, à ce que, lorsque des émissions télévisées ne respectent pas les dispositions du présent chapitre, des mesures appropriées soient appliquées pour assurer le respect de ces dispositions.
CHAPITRE V
Protection des mineurs
Article 22
Les États membres prennent les mesures appropriées pour assurer que les émissions des organismes de radiodiffusion télévisuelle qui relèvent de leur compétence ne comportent pas de programmes susceptibles de nuire gravement à l’épanouissement physique, mental ou moral des mineurs, notamment des programmes comprenant des scènes de pornographie ou de violence gratuite. Cette disposition s’étend aux autres programmes qui sont susceptibles de nuire à l’épanouissement physique, mental ou moral des mineurs, sauf s’il est assuré, par le choix de l’heure de l’émission ou par toutes mesures techniques, que les mineurs se trouvant dans le champ de diffusion ne voient pas ou n’écoutent pas normalement ces émissions.
Les États membres veillent de même à ce que les émissions ne contiennent aucune incitation à la haine pour des raisons de race, de sexe, de religion ou de nationalité.
CHAPITRE VI
Droit de réponse
Article 23
1. Sans préjudice d’autres dispositions civiles, administratives ou pénales adoptées par les États membres, toute personne physique ou morale, sans considération de la nationalité, dont les droits légitimes, en ce qui concerne notamment son honneur et sa réputation, ont été lésés à la suite d’une allégation incorrecte faite au cours d’un programme télévisé, doit pouvoir bénéficier d’un droit de réponse ou de mesures équivalentes. 2. Le droit de réponse ou les mesures équivalentes peuvent être exercés à l’égard de tous les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence d’un État membre.
3. Les États membres adoptent les dispositions nécessaires pour établir ce droit ou ces mesures et déterminer la procédure à suivre pour leur exercice. Ils veillent notamment à ce que le délai prévu pour l’exercice du droit de réponse ou des mesures équivalentes soit suffisant et à ce que les modalités soient telles que ce droit ou ces mesures puissent être exercés de façon appropriée par les personnes physiques ou morales résidant ou établies dans d’autres États membres.
4. La demande d’exercice du droit de réponse ou des mesures équivalentes peut être rejetée lorsqu’elle n’est pas justifiée au regard des conditions énoncées au paragraphe 1, qu’elle implique un acte punissable, que sa diffusion engagerait la responsabilité civile de l’organisme de radiodiffusion télévisuelle ou qu’elle est contraire aux bonnes moeurs.
5. Des procédures de nature à permettre l’introduction d’un recours juridictionnel en cas de litiges portant sur l’exercice du droit de réponse et des mesures équivalentes seront prévues.
CHAPITRE VII
Dispositions finales
Article 24
Pour les domaines qui ne sont pas coordonnés par la présente directive, celle-ci n’affecte pas les droits et obligations des États membres qui découlent des conventions existant en matière de télécommunications et de radiodiffusion télévisuelle.
Article 25
1. Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 3 octobre 1991. Ils en informent immédiatement la Commission.
2. Les États membres communiquent à la Commission les dispositions essentielles de droit interne qu’ils adoptent dans les domaines régis par la présente directive.
Article 26
Au plus tard à la fin de la cinquième année à compter de la date d’adoption de la présente directive, puis tous les deux ans, la Commission soumet au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social un rapport relatif à l’application de la présente directive et, le cas échéant, formule des propositions en vue de l’adaptation de celle-ci à l’évolution du domaine de la radiodiffusion télévisuelle.
Article 27
Les États membres sont destinataires de la présente directive.
Fait à Luxembourg, le 3 octobre 1989.
Par le Conseil
Le président
R. DUMAS