Le débat parlementaire sur la Loi de santé débute. La politique de prévention y occupe une place centrale. Cette loi de santé publique propose ainsi de nouvelles mesures pour lutter contre le tabagisme, et mettre ainsi en œuvre le Programme national de réduction du tabagisme (PNRT) annoncé par la ministre de la santé, Marisol Touraine. Elle doit instaurer le paquet neutre, un paquet standardisé où le nom de la marque sera limité à une inscription de taille définie, dont la couleur sera la moins attractive possible, et sur lequel apparaîtront des avertissements sanitaires : un message et une image sur les méfaits du tabac. Les objectifs sont de supprimer cet élément de publicité que constitue le paquet et poursuivre le travail engagé de « dénormalisation » de ce produit, considéré comme celui en vente libre le plus toxique pour la santé. Chaque année, 73 000 personnes meurent du tabac. Il s’agit de la première cause évitable de décès. Simone Veil (1976) puis Claude Evin (1991) ont contribué à réduire de manière drastique la publicité en faveur du tabac.
Parts de marché
Parlons clair, si les marques usent de la publicité, c’est que cela produit des gains de notoriété et des comportements d’achat, des parts de marché, et donc génère des revenus et des profits. La publicité en faveur du tabac subsiste en France, de manière insidieuse, portée par au moins quatre vecteurs : au cinéma (il est fréquent de voir apparaître à l’écran des marques de cigarettes), chez les buralistes (où, comme l’a montré une excellente étude du Comité national de lutte contre le tabagisme, des publicités illicites sont exposées), sur Internet (Facebook, YouTube, etc.) et enfin à travers le paquet de cigarettes, le « vendeur muet ». Le design de la marque sur les paquets reste un vecteur et marqueur publicitaire important pour les jeunes, les femmes, les fumeurs ; chaque marque ayant sa cible. Quand on sait qu’un fumeur d’un paquet par jour expose à son entourage 20 fois la marque par jour, soit 7300 fois par an – et comme 13 millions de personnes fument, cela fait quand même beaucoup d’occurrences en faveur du produit… L’autre objectif du paquet neutre est de poursuivre le travail de « dénormalisation » du tabac, c’est-à-dire de jouer sur l’image du tabac pour le rendre non attractif.
La politique de lutte contre le tabagisme est constante dans ce domaine depuis la loi Evin : fumer dans un transport en commun, au restaurant, pendant un cours n’est plus accepté, ni imaginable au XXIe siècle en France. Cependant, l’image du tabac est loin d’être « dénormalisée » dans notre pays : les terrasses des cafés sont devenues des lieux quasi exclusivement fumeurs, certaines lois sont peu respectées (interdiction de vente de cigarettes aux mineurs, publicités illicites sur les lieux de vente, etc.), un tiers de la population fume, et l’essor de la cigarette électronique a clairement permis une certaine forme de revalorisation de la tabagie à travers la promotion du vapotage. Ce n’est pas pour rien que la ministre de la santé souhaite encadrer cette publicité et interdire le vapotage dans les écoles, les transports collectifs, les espaces clos de travail, car il ne faut pas que la cigarette électronique devienne le nouveau vecteur d’une publicité en faveur des produits du tabac. Au moment du vote de la Loi de santé, le débat se cristallise sur l’efficacité du paquet neutre, les uns le considérant comme inefficace, les autres comme très efficace.
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