Municipales à Paris : et si on interdisait la cigarette dans la rue ?

Plusieurs de nos lecteurs proposent d’interdire de fumer dans la rue à Paris, comme cela est déjà le cas dans 52 parcs et jardins de la capitale.

 Aujourd’hui, il est déjà interdit de fumer dans 52 jardins et aux abords de 23 écoles à Paris.
Aujourd’hui, il est déjà interdit de fumer dans 52 jardins et aux abords de 23 écoles à Paris. LP/Benjamin Derveaux

    Durant la campagne des élections municipales des 15 et 22 mars 2020, Le Parisien invite ses lecteurs à lui envoyer les propositions qu'ils souhaiteraient voir émerger. Chaque semaine, une partie d'entre elles sont sélectionnées et passées au crible par la rédaction.

    Ce mardi, nous nous penchons sur la possibilité d'interdire de fumer dans la rue. Une proposition qui figure à plusieurs reprises parmi les contributions déjà reçues.

    De quoi parle-t-on ?

    Il s'agit tout simplement d'interdire de fumer dans la rue à Paris et, plus globalement, dans tous les espaces publics à l'air libre (voirie, parc, jardins, etc.). Aujourd'hui, la seule restriction au niveau national concerne « les lieux affectés à un usage collectif, notamment scolaire, et les moyens de transport collectif, sauf les emplacements expressément réservés aux fumeurs », indique l'article L3511-7 du code de la santé publique.

    Depuis le 1er janvier 2008, il est aussi interdit de fumer dans les cafés, hôtels et restaurants, à Paris comme partout en France. « La rue et les domiciles privés d'habitation ne sont donc pas concernés par l'interdiction », résume l'association Droits des non-fumeurs (DNF).

    Est-ce que ça a déjà été testé ?

    Non. En revanche, depuis le 8 juin 2019, on ne peut plus allumer de cigarette dans 52 parcs et jardins de Paris. Une précédente expérimentation, dans seulement six parcs, avait été lancée en juillet 2018.

    Le Parc Georges Brassens était l’un des six concernés par une interdiction de fumer en 2018. LP/Jean-Baptiste Quentin
    Le Parc Georges Brassens était l’un des six concernés par une interdiction de fumer en 2018. LP/Jean-Baptiste Quentin LP/Benjamin Derveaux

    L'amende prévue en cas de non-respect de cette interdiction est de 38 euros… mais aucune n'a été infligée. « Ça ne fait même pas un an, ce serait contre-productif de verbaliser sans faire passer, dans un premier temps, le message d'avertissement », justifie la mairie de Paris.

    Par ailleurs, une autre expérimentation a été lancée à la rentrée de septembre 2019 pour interdire de fumer aux abords de 23 écoles volontaires. L'initiative a été prise conjointement par la Ligue de lutte contre le cancer et par la mairie de Paris, qui gère ces établissements. À l'échelle nationale, en 2018, sur le même principe près de 1600 « espaces sans tabac » avaient été mis en place dans 389 communes françaises. « On encourage les communes à le faire dans tous les lieux publics à ciel ouvert, comme les jardins, les plages et les abords des écoles », nous indique la Ligue de lutte contre le cancer. Selon un sondage Ipsos réalisé par l'association en janvier dernier, 89 % des Français interrogés sont favorables à l'interdiction de fumer « dans les parcs et les jardins publics », et 86 % « aux abords des établissements scolaires ».

    À l'étranger, New York est allée plus loin. En 2011, la ville américaine a non seulement interdit de fumer dans ses 1200 parcs, mais aussi dans plusieurs quartiers piétons, comme Times Square. Dans certaines villes japonaises, comme Yokohama ou Kyoto, il est également interdit de fumer sur la voie publique, à l'exception de zones sur le trottoir spécialement prévues pour fumer.

    Combien ça coûterait ?

    A priori, interdire de fumer dans la rue ne devrait pas coûter d'argent à la Ville. Sauf si elle doit recruter davantage d'agents pour s'assurer qu'une telle réglementation serait totalement respectée.

    À l'inverse, cela pourrait lui permettre d'empocher le montant des amendes en cas de verbalisations. Autre bénéfice à attendre, cela pourrait permettre de réduire encore davantage la consommation de tabac, en tout cas à Paris. Selon Santé publique France, 1,6 million de Français ont arrêté de fumer en 2017 ou 2018. Ce qui n'est qu'une partie de ceux qui ont entrepris une démarche en ce sens : ceux-là étaient 3,4 millions en 2018, selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies.

    Par ailleurs, interdire de fumer dans la rue permettrait de réduire le nombre de mégots jetés dans la rue. « Or un seul suffit à polluer plus de trois cents litres d'eau. Ces restrictions permettent aussi de ne pas montrer aux plus jeunes un monde de fumeurs, de ne pas le côtoyer », estimait en août 2018 dans Le Parisien Alexandre Duguet, pneumologue à la Pitié-Salpêtrière (AP-HP).

    Qu'en disent les principaux candidats à Paris ?

    Contacté via leur entourage, aucun des principaux candidats à la mairie de Paris ne propose de généraliser l'interdiction de fumer dans la rue. « Nous ne proposons pas d'interdire la cigarette dans l'espace public mais nous continuerons l'expérimentation d'interdiction de fumer dans 52 parcs et jardins », promet l'équipe d'Anne Hidalgo.

    « Nous n'avons pas une position aussi radicale sauf dans le cas où les enfants sont confrontés à la vision d'un adulte fumant à l'extérieur. Nous ne voulons plus voir de fumeurs aux abords des écoles », indique le groupe EELV à Paris, que préside le candidat à la mairie David Belliard.

    De son côté, Cédric Villani ne prévoit « pas d'évolution », mais « une verbalisation systématique des jets de mégots et la mise à disposition de cendriers, notamment aux abords des cafés et restaurants », indique son équipe de campagne.

    Contacté avant l'affaire des vidéos intimes qui lui a coûté sa candidature, Benjamin Griveaux n'avait pas encore donné sa réponse. L'entourage de Rachida Dati ne nous a pas répondu non plus.

    Alors, jouable ou pas ?

    La mairie de Paris a le pouvoir d'interdire de fumer sur son territoire, sans devoir passer par une loi au niveau national. Mais si cette mesure peut être bénéfique pour la santé et pour l'environnement, elle risque d'être compliquée à appliquer. Notamment car le nombre de fumeurs, même s'il baisse, reste assez important. Il est peu probable que ce type d'initiative soit populaire auprès d'eux.

    Comment envoyer vos propositions ?

    Vous pouvez nous écrire par courrier électronique à l'adresse lelabo@leparisien.fr ou remplir le formulaire ci-dessous (s'il ne s'affiche pas, cliquez ici).