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Réduire le tabagisme, un plan voué à l’échec

Pour Catherine Hill, épidémiologiste, l’absence de politique de santé publique efficace sur le prix ne permettra pas d’atteindre les objectifs annoncés par la ministre de la santé pour 2025.

Publié le 27 janvier 2015 à 12h27, modifié le 19 août 2019 à 13h39 Temps de Lecture 5 min.

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La direction générale de la santé a demandé à un certain nombre d’experts, dont je suis, une estimation de l’impact potentiel du programme national de réduction du tabagisme en termes de vies épargnées… si les objectifs annoncés par la ministre de la santé étaient respectés. Ces objectifs sont de réduire le nombre de fumeurs de 10 % dans cinq ans, de descendre sous la barre des 20 % de fumeurs dans dix ans et que les enfants qui naissent aujourd’hui soient dans vingt ans la première génération de non-fumeurs. Aujourd’hui, la proportion de fumeurs est d’environ 33 %, le premier objectif est donc d’arriver à 30 % dans cinq ans donc en 2020, le second est de passer de 30 % de fumeurs à 20 % dans les cinq années suivantes, c’est-à-dire en 2025.

Ces objectifs pourtant peu ambitieux, au moins pour le premier, ne seront pas atteints pour deux raisons : l’une démographique et l’autre économique. En effet, au fur et à mesure que vieillissent les générations de femmes entrées en masse dans le tabagisme au début des années 1970, suivies par des générations plus jeunes qui fument autant, la prévalence du tabagisme augmente dans la population féminine ; attendre ainsi une diminution n’est pas réaliste, en tout cas dans cette moitié de la population ! La seconde est économique : le prix du tabac n’a que très peu augmenté depuis 2004 et, en conséquence, les ventes sont à peu près stables. Un papier récent dirigé par une équipe anglaise (Ann McNeill et al., Addiction, 2014) explique que cette politique du prix du tabac du gouvernement français est la cause la plus probable de l’augmentation de la proportion des fumeurs en France entre 2005 et 2010, alors qu’en Angleterre, les prix augmentaient et la proportion de fumeurs baissait.

« Augmenter le prix du tabac est de loin la mesure la plus efficace pour faire diminuer la consommation »

Augmenter le prix du tabac est de loin la mesure la plus efficace pour faire diminuer la consommation. Le triplement du prix du tabac en euros constants observé en France entre 1991 et 2004 en est une preuve exemplaire, car ce triplement du prix a entraîné une division par deux des ventes dans le circuit des buralistes, baisse très partiellement atténuée par les achats transfrontaliers et la contrebande estimés représenter 20 % à 25 % de la consommation. Bercy prétend craindre une baisse des ressources fiscales du tabac si on augmente les prix. Mais cette crainte est absolument sans fondement. En effet, quand le tabac augmente de 20 %, les ventes ne baissent que de 8 % à 10 %, les revenus du tabac augmentent donc, aussi bien pour le fisc, que pour les buralistes et pour les industriels. Ainsi pendant que le prix réel du tabac triplait, les ressources fiscales doublaient en euros constants, passant de 6,6 milliards d’euros en 1991 à 12,8 milliards d’euros en 2004 (elles sont de 13,5 ou 13,4 milliards par an entre 2011 et 2013). De même, les buralistes crient misère mais leurs revenus liés au tabac ont doublé en euros constants entre 1991 et 2011, passant de 0,76 à 1,56 milliard d’euros, si on tient compte des aides supplémentaires qu’ils ont obtenues depuis 2007. Le revenu par buraliste a augmenté encore davantage car le nombre de buralistes a diminué.

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